Jeudi 2 août
Un titre peut-être un poil racoleur pour commencer ce nouveau récit, mais c'est de bonne guerre...
C'est à l'Asie du Sud Est que nous avons décidé de dire bonjour cet été. Pour moi c'est un peu un retour, ma précédente incursion dans les environs datant de 2007... même s'il est peu probable que je refoule les mêmes endroits. Pour Alice c'est une première en Asie !
Voici donc racontée la première étape de ce périple, au Vietnam. Le Vietnam du Sud cette fois. A noter que le titre de ce post n'a pas non plus aucun fondement : nos pas nous ont mené dans des villes commençant invariablement par la lettre H : Hong Kong, Ho Chi Minh Ville, Hoi An, Hué, ... comme par hasard.
Vendredi 27 juillet
Veille du départ… et première galère ! En fin d’après-midi, Go Voyage laisse un message sur mon portable : "rappelez d’urgence, tous les vols d’Aerosvit – compagnie ukrainienne – sont annulés jusqu’à nouvel ordre". Pas mal pour un début. Je rappelle, la meuf nous dégotte un nouvel aller-retour sur les mêmes dates, sur Cathay Pacific Airways, considérée comme une des meilleures compagnies au monde. On prend.
Samedi 28 juillet
Après 3 petites heures de sommeil et des sacs vite bouclés, TGV pour Paris avant d’embarquer dans l’avion et décoller. La Cathay Pacific, c’est plutôt pas mal en effet, mais loin du standing auquel on s’était habitué en partant à Dubaï en first (!). Je sors mon nouvel appareil photo pour me faire un peu à l’engin et me rend compte (galère n°2) que j’ai oublié d’y remettre la batterie après l’avoir chargé. C’est pas encore des trucs trop emmerdants, mais ça augure d’un bon niveau pour la suite ! Alice me lance déjà des regards qui tuent, genre "qu’est ce que tu nous prépares pour la suite"… On a quand même du mal à trouver le sommeil.
Dimanche 29 juillet - Hong Kong
Arrivée à Hong Kong à 7h locales. Pour nous il est 1h, et on n’a dormi moins de 2h chacun : le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on n’est pas frais frais, et on a 8h à poireauter ici. Alice sort fumer une clope, on se prend une chaleur de fou avec 90% d’humidité dans l’air… j’avais oublié. On rentre vite dans l’aéroport prendre le Shuttle express climatisé qui nous débarque en plein centre ville sur l’île de Hong Kong. Balade au milieu de la jungle urbaine et des buildings géants, traversée de dizaines de centres commerciaux aux boutiques de luxe, petit café dans un Starbuck. Il est tôt, les magasins ne sont pas encore ouverts, mais tous les vendeurs sont déjà en tenue. Dans le nouvel Applestore de la Hong Kong Station, un manageur est en pleine imprécation, il galvanise les troupes, probablement en leur rappelant bien haut les valeurs de la boite et les préceptes de ventes de Steve Jobs… les employés transis applaudissent chaque diatribe à l’unisson.
Balade en hauteur sur les ponts piétons au dessus des voies express ultra bruyantes. De nombreux Hong Kongais s’y relaxent dans des parcelles de cartons aménagées à même le sol. Passage dans le « quartier des escalators », ou Pierre m’avait hébergé en 2005… souvenirs. Sur une section en hauteur, tous les passants se pressent pour observer la rue en contrebas : des dizaines de flics ont barré la rue et sont en train de faire une perquisition… un gang mafieux déguisé en poissonniers ? On s’invente des films, on est en plein dedans.
Le vieux ferry permet toujours de franchir la baie pour rejoindre la péninsule de Kowloon, embarquement. Sur l’autre rive, encore des buildings sans discontinuer, et toujours cette touffeur, qu’on fuit en traversant des malls. J’achète une nouvelle batterie pour appareil photo, en trois secondes et pas chère. Le passage à HK aura au moins servi à ça. C’est assommé de fatigue qu’on finit par repartir en direction de l’aéroport.
Nouveau vol sans encombre avec Vietnam Airlines, atterrissage à Ho Chi Minh vers 17h30. On change un peu d’Euros en Dongs (1€ = 25 000D) et on arrive à se faufiler entre les taxis pour prendre de bus n°152 (presque gratuit) direction le centre ville. Le truc le plus frappant est le nombre spectaculaire de scooters dans les rues, à chaque croisement, qui se faufile en masse, de manière absolument chaotique. Ca me semble encore plus impressionnant qu’à Hanoi il y a 7 ans. On est lâché à Pham Ngu Lao, le quartier des routards, en plein centre, avec des hôtels accessibles. Le quartier grouille de touristes, mais aussi de population locale. Les trottoirs sont assiégés par les scooters garés, les rues par les scooters en mouvement, qui zigzaguent pour nous doubler en klaxonnant. De nombreux hôtels sont blindés, un tenancier gentil passe plein de coups de fil pour nous jusqu’à trouver une chambre libre dans un hôtel pas loin, le Victoria hôtel, qui vient d’ouvrir.
Bien installés dans une chambre climatisée pas chère avec clim, wifi, télé… une bonne douche et c’est reparti, histoire de boire un coup et prendre la température du bazar avant de « tilter » pour de bon. Il fait chaud mais plutôt bon, et beaucoup moins humide qu’à HK. Petit café d’angle, je retrouve la joie de la Tiger beer, Alice se régale d’un cocktail maison à bas de fruits frais. On est arrivé, on est bien. Mais quand même alpagué sans arrêt par des vendeurs de lunettes, de cigarettes et autres « denrées à touristes ». Un vendeur de clope vient plus prêt de moi : « Malawane ? ». Je ne comprends pas. Il sort de sa poche un gros bloc de Marijuana. A ok pardon. Il s’éloigne, on rigole avec Alice et on se dit qu’il est quand même peu probable qu’on nous propose toutes les drogues existantes en pleine rue dans un pays à la justice si sévère. Deux minutes plus tard, un autre : « Cigarettes ! ». Il s’approche… « Malawane ! »… plus prêt, en chuchotant : « Cocane ? ». Cette fois on a compris… on hallucine.
Lundi 30 juillet - Ho Chi Minh Ville
Réveil vers 11h, on avait besoin de rattraper le gros retard de sommeil accumulé.
Direction la jungle urbaine, sans plus attendre. Traverser chaque rue à pied devient vite un challenge, un jeu dans lequel on a l’impression de risquer sa vie à chaque partie. Aucun feu, enfin si, de rares fois, mais pas vraiment respecté. Les deux roues se faufilent partout à la moindre opportunité. On n’a guère le choix que de s’engager en croisant les doigts pour que les motos nous esquivent.
Balade dans le quartier de Dong Khoi, quartier du centre ville bordant la rivière Sai Gon. Des hôtels luxueux et boutiques de luxe y côtoient des marchés de rues, des magasins d’antiquités et une vie à mille à l’heure. On goûte un mangoustan frais, fruit aussi délicieux que dans mes souvenirs. Le quartier est dominé par le building de la bitexco, on y monte pour admirer la ville. Juste au dessus de nous (vers le 50ème étage), un immense héliport protubérant se détache de la tour. On apprendra par la suite que les hélicos n'ont finalement jamais été autorisés à y atterrir ! Nos pas nous entrainent dans la rue des tailleurs, puis dans celle des godasses… l'Asie n’a pas perdu sa bonne vieille habitude des rues à thèmes.
Dans de longs parcs, les habitants jouent aux dames chinoises, au ballon ou au badminton. Grimpée dans un bar lounge au 23ème étage d’un building, dégustation de thé vietnamien alors qu’une averse de mousson inonde la ville à l’extérieur. Mais ça ne dure pas et le soleil revient… par intermittences.
Nouvelle étape à pieds, les klaxons et les bruits de rue deviennent pénibles, les traversées demandent de plus en plus de concentration. Les trottoirs sont devenus des parkings à scooter, il y a même des « scooteriers » pour garer les véhicules devant les cafés, vu le peu de place qu’il reste. Les vietnamiens sont nombreux à porter des masques, pour se protéger de la pollution tout en gardant bien sagement ses microbes, mais surtout pour éviter de bronzer : leur pire cauchemar, ça fait bouseux. Les filles rivalisent de créativité pour rendre ça coquet, avec des masques Lacoste ou Gucci décorés avec des fleurs et des petits oiseaux. Genre je me déguise en Hannibal Lecteur, mais faut que je reste mignonne (pas gagné). On croise aussi, histoire oblige, un nombre assez important de culs de jatte qui se déplacent avec d’ingénieuses voiturettes à mains.
Retour à l’hôtel, temps de réflexion sur la suite à donner au voyage, discussion super sympa avec la meuf de l’hôtel, à qui j’apprends les frontières du Laos et du Vietnam sur une carte, réservation de train et booking d’hôtel sur l’iPad (nouveau gadget qu’on na pas finit de trouver bien utile, même s’il nous enferme un peu plus chaque jour dans la prison dorée de la Pomme).
On va manger à côté, dans un établissement conseillé par la taulière, qui ne paye pas de mine, mais dans lequel on déguste d’excellents Pho, soupe de nouilles de riz dans un bouillon délicieusement épicé, dans lequel on ajoute des morceaux de bœuf ou de poulet, du citron lime, du piment, des pousses de soja, des feuilles de basilic poivrées… on n’en laisse pas une goutte, un régal.
Dans un étal de rue à côté, une mamie prépare des sandwiches (banh-mi). Je lui demande ce qu’elle met dedans : « mitba ». Je comprends en regardant la casserole, ce sont des boulettes de viandes (meat ball).
Dans la chambre d’hôtel, on se paye une tranche de JO à télé : haltérophilie, pingpong et plongeon synchronisé, ...
Mardi 31 juillet
Réveil vers 10h30. Dire que j’ai passé une nuit de merde serait minimiser le truc. Nuit pourrie donc, grosse insomnie… le décalage horaire ne semble pas tout à fait digéré.
Retour rapide dans la jungle urbaine d'Ho Chi Minh City. On suit les conseils du Lonely pour aller déjeuner au Nha Hang Ngon, de la cuisine de rue sublimée devant nos yeux. Bouffe vraiment top, des choses qui semblent simples (nems, ailes de poulet, riz gluant, sauces soja et nuoc cham..) mais avec à chaque fois le petit goût en plus, l’assaisonnement idéal et créatif, un mélange de saveur imprévu sucré salé…
Visite du Palais de l'Indépendance, austère bâtiment au milieu d’un grand parc, qui semble figé dans les années 70, au moment de sa libération par l’armée communiste. Une jolie guide à longue robe rouge moulante nous fait la visite, tout est fait pour mettre en scène le courage de ceux par qui le pays a été libéré des français, puis des américains. Salles de réception de haut standing, tableaux et meubles laqués, statues à la gloire d’Ho Chi Minh, drapeaux rouges à l'étoile jaune, bunker en sous-sol avec cartes secrètes, documents jaunis sur lesquels les troupes sont recensées, salles de commandement et de télécommunications (2 téléphones). Sur la terrasse stationne un hélico d'époque. On est en plein James Bond. Dans le parc autour, répliques des tanks libérateurs superstars, avions de guerre et... terrain de tennis (?)
On enchaine avec le musée des souvenirs de guerre. Un bâtiment de deux étages lui aussi entouré de vieux tanks, chars et avions de guerre à étoile. Le musée est principalement constitué de photos datant de la guerre du Vietnam. On y voit de manière on ne peut plus crue les atrocités commises pendant la guerre par l’armée américaine : tortures, tirs sur des femmes et enfants tentant de fuir, propagation d’agent orange dans les campagnes (et nombreuses conséquences catastrophiques), forêts détruites au napalm, intoxications diverses… tout ça illustré de témoignages divers, de textes de lois, d’aveux, de chiffres macabres et de statistiques morbides. On a conscience que le musée est on ne peut plus partial dans sa vision des événements, mais je ne suis malheureusement pas persuadé qu’il y ait la moindre exagération dans tout ça.
C’est le cœur un peu retourné qu’on monte dans un taxi relou au compteur trafiqué (il défile de manière totalement excessive) qui nous entube correctement. Petit tour dans la Pagode de l'empereur de Jade, avec possibilité d’acheter des poissons et des tortues pour les jeter dans des bassins en offrande à je ne sais quelle divinité. Problème, les bassins sont blindés et les bestioles semblent y crever d’étouffement. A l’intérieur, des gros bouddhas, des sculptures fines sur bois d'ébène, l’odeur d'encens, et des mec cheulous.
Retour à la guerre (de la rue) et à la joie des traversées hasardeuses. Alice tique sur une boutique de fringue et s'achète des t-shirts branchouille. On grimpe au 6ème étage d'un immeuble pour se boire un cocktail en plein happy hour dans un bar classieux, près du « lac de la tortue ». Environ 4 serveurs pour chaque client, on ne pensait pas être aussi attendu.
Le temps est incertain, toujours changeant, nuageux avec de belles éclaircies et un vent chaud. L’agréable fraîcheur en soirée vient contrebalancer la lourdeur du jour, elle-même contrebalancée par une clim’ exagérément froide dans tous les intérieurs.
On retourne dîner au Nha Hang Ngon, qui avait clairement un goût de reviens-y. Rouleaux de printemps exquis, Pho de qualité, bière Saigon. On y est.
Retour à pied il fait nuit, la ville est dans son rythme nocturne, boutiques, bars, Night clubs. Les couples viennent par centaines garer leur deux roues le long des parcs, rester dessus à discuter et se "tripoter sur le scooter", occupation agrée semble-t-il par tous, loin du plan loose qu'il ne manquerait pas de représenter chez nous.
A 22h, un taxi vient nous prendre à l’hôtel pour nous emmener à la gare d’Ho Chi Minh. Et c’est parti pour 16h de trajet dans un lit couchette, dans une cabine de 4 personnes. Alice et moi sommes en haut, et en dessous c’est toute une famille qui s’est agglutinée et qui parle fort (et viet). J'écris ces lignes allongé, avec mon iPhone… aidez moi à m’extraire du pouvoir de la Pomme !
Mercredi 1er août - Hoi An
Pendant la nuit, Thomas m’a fait vivre en direct la victoire épique de Tsonga contre Raonic aux JO, en streaming texto. Environ 30 textos, et la note du film risque d’être assez salée ! Il en profite pour me faire croire que Teddy Riner a été suspendu pour dopage. Me prend vraiment pour un con.
Arrivée vers 15h à Da Nang, ville du centre du pays, beaucoup plus au nord. On cherche un moyen de rejoindre Hoi An, à quelques 30 km de là. Les bus sont introuvables et les taxis chers. On arrive à trouver un gars louche qui nous propose une place au rabais dans un van, avec un autre espagnol… mais on doit attendre. De plus en plus louche, mais le truc fonctionne parfaitement ! Le van longe la mer de Chine, et passe à côté de fabriques d’objets en marbres, provenant d’une immense carrière de marbre, dans le coin.
En arrivant dans la veille ville de Hoi An, un truc saute aux yeux : le nombre d’enseignes de tailleurs, environ une boutique sur deux ! C’est donc la capitale du sur mesure. Mais je ne pense pas qu’on se laissera tenter.
On élit domicile à l’hôtel Than Van, en plein cœur de ville (avec même une piscine dans le patio central), avant d’aller flâner alentours. Rien à voir avec Ho Chi Minh, la ville est beaucoup plus calme, mignonne comme tout, avec moins de scooter (mais quand même), plus de vélos, et même des mobylettes électriques, pour le grand plaisir d’Alice. Petits ponts cosy, arbres en fleur, nombreux lampions multicolores accrochés à toutes les façades, temples, vieilles demeures. Le tout nimbé d’une ambiance assez bucolique, avec une rivière coupant la vieille ville en deux.
On va quand même se renseigner sur les prix chez un tailleur. Résultat : un costume complet avec chemise commandés sur le champ. Modèle Hugo Boss. Alice a réussie à ne pas craquer. On rentre dans une autre boutique, celle de la sœur du chauffeur qui nous a amené en ville. Souriante, sympa, tranquille. Quand Alice en sort, elle a commandé une robe sur mesure ! Va pas falloir rester là trop longtemps.
On est bien tombé : ce soir, c’est une fête nationale ou locale truc machin. Enfin je sais pas trop quoi, mais c’est une fois par mois, et à cette occasion la ville n’émet pas d’autre lumière que celle des lampions et des bougies flottantes déposées par de longues tiges dans l’eau de la rivière, depuis le pont central. C’est le merdier, plein de monde partout, mais l’atmosphère est assez magique et festive. Un groupe joue de la musique traditionnelle. Le patelin est vraiment joli, même si à l’heure du dîner le nombre de touristes est assez étouffant.
On se promène un peu avant de se laisser tenter par le Morning Glory et son mélange de cuisine vietnamienne et occidentale. Là aussi, des tentatives de fusion culinaires, plus ou moins glorieuses (malgré le nom). En fait tout est bon et alléchant sur le papier (mousse de crevettes dans un bâton de sucre de canne, …) mais rien véritablement extraordinaire. On se dit quand même qu’on s’est plus qu’embourgeoisé, il va falloir revenir à la bonne vieille routardise bien vite (ou je risque de perdre mes plus fidèles lecteurs) !
Jeudi 2 août
Lever vers 9h30. Petit déjeuner à côté de la piscine.
Balade dans les rues, visite d’une « manufacture artisanale » payante, qui ne contient en fait que des boutiques ! Ils sont vraiment bons.
Visite d’une vieille maison de famille, avec puits de lumière, meubles décorés avec des idéogrammes de nacre en forme d’oiseaux, hôtel à la mémoire des 7 générations d’ancêtres…
Visite de jolis temples, grande fontaine de pierre en forme de serpent, tortillons d’encens suspendus, statues de bouddhas, corbeilles d’offrandes de fruits. Et puis un pont de bois japonais, avec un temple au milieu.
Il fait plus que chaud dehors et il est à peine midi. Dans le centre du Vietnam, la saison des pluies dure d’octobre à décembre, le reste du temps il fait chaud et plutôt sec. Pose jus de citron frais dans un petit rade encore en construction.
Boutiques en folie, à mon tour d’acheter un T-shirt branchouille (Yoda avec des Ray-Ban). Et puis un chapeau, vu la chaleur. Une boutique attire mon attention : le seul présentoir met en avant l'intégrale de "Game of Thrones" ! Je crois que l’œuvre de Georges Martin a vraiment franchit un cap.
Petite pause décontraction piscine à l’hôtel, le temps que le soleil calme ses ardeurs.
Retour chez Kimmy, mon tailleur. Riche, à n’en pas douter, vu l’affluence qui se presse dans l’enseigne. Ma « costumière » m’apporte mon costume et ma chemise. Essai. Claaaaase. Bon, pour elle il y a des imperfections, elle met des coups de craie partout pour procéder aux réajustements : épaulettes, cintrage à la taille et aux manches, bas de pantalon, bas de veste, … l’ensemble lui est donc rendu pour les retouches. Mais quand même, me dit-elle, ce serait dommage d’avoir un si beau costume sans les belles chaussures sur mesures qui vont avec, non ? Quand même pas. Mais c’est combien ? Ah, et c’est ta sœur qui fait les chaussures ? Elle m’accompagne avec une bonne main au cul. C’est une très bonne vendeuse.
Vu qu’on est bon pigeon, je ressors de chez la sœur avec une paire de mocassins en fabrication… et Alice une paire de belle chaussure à talon… et une autre paire de ballerines ! Sortez-nous d’ici, on devient complètement cons.
Le soir, on se décide sur l’activité du lendemain : promenades en vélo dans l’arrière pays. On demande à la meuf de l’agence, gentille comme tout, si elle peut nous conseiller un endroit sympa et pas cher pour manger. Direction le Bamboo Buddha : encore un semi-gastro ! Evidemment c’est pas cher pour nous, mais on commence vraiment à se demander si on s’est pas embourgeoisé bcp plus que de raison ! On cède encore à la lecture de la carte, qui comprend de la « tomme de Savoie de Hanoï » ! L’espagnole qui tient le resto est ultra sympa, et on le repas est top. Plus de liquide pour payer, on paye par carte. Celle d’Alice n’est pas acceptée. La mienne non plus. Le distributeur le plus proche est en panne. Le deuxième est ok, mais je ne peux tirer qu’un petit montant. Ça suffira, mais avec toutes nos conneries, faudrait pas qu’un vrai problème de liquidité nous tombe sur la gueule !
Vendredi 3 août
Premier réveil forcé : une fanfare passe dans la rue à côté de l’hôtel, avec chants, tambours, cuivres… il est 5h25 ! Ils sont fous ces viets.
Deuxième réveil programmé : un peu avant 7h. On rejoint l’agence Heaven & Earth tenue par Pacal, un français, et sa femme vietnamienne, qui sont venus s’installer ici il ya 4 ans, après avoir vécu 12 ans en France (et fais 2 gosses, 6 et 12 ans). On part donc à vélo dans la campagne environnante avec deux couples plus âgés, un nippon et un australien (à en croire la ressemblance frappante de la meuf avec Samanta Stosur… à y bien réfléchir, il est même hautement probable que ce soit sa sœur), accompagné par Thé, vietnamienne anglophone bien rigolote, et Pascal, rien que pour nous. Le parcours s’étend sur une dizaine de km, sur des petits chemins paumés entre les rizières, sous le regard un peu ahuris des buffles d’eau.
La présence de Pascal est précieuse. Il nous fait partager son expérience de la région et nous éclaire sur le mode de vie des paysans vietnamiens, la récolte du riz, l’entraide dans les familles, les croyances et superstitions locales, les conséquences des inondations récurrentes qui sévissent pendant la saison des pluies (entre octobre et décembre localement), le coût de l’immobilier, l’évolution des mentalités, les fêtes traditionnelles… et plein d’’autres sujets passionnants. On a également l’occasion d’observer la production artisanale de Cao Lầu, la plus fameuse nouille de riz de Hoi An dans une petite maison familiale, avant de se faire enseigner le nom de nombreuses herbes et plantes locales dans une ferme de village. On passe un moment à observer les paysans vaquer à leurs tâches sous un soleil de plombs, loin du tumulte et des klaxons de la ville. Une belle leçon d’humilité, et on se sent pour la première fois du voyage véritablement immergé.
De retour en ville vers 10h, Pascal nous laisse les vélos… le temps d’aller se rafraichir dans la piscine (le soleil tabasse déjà, le thermomètre affiche plus de 35°).
On repart avec lui pour un tour plus long l’après-midi. Une petite famille toulousaine nous tient cette fois compagnie, Véronique, et Salim, la quarantaine, avec leurs enfants Yasmine (10 ans) et Sammy (7 ans), fins cool. On est aussi accompagné par Bhé, assistante de Pascal, qui essaye d’apprendre le français mais en chie, et qui nous fait vraiment marrer.
Dans un premier temps, on embarque avec les vélos sur un bateau qui nous porte sur la rivière pendant 45 minutes et nous débarque sur une île sans aucune route. Pendant le trajet, les nuages se sont amoncelés et une grosse averse est tombée. Ça rafraichit l’atmosphère. On roule jusqu’à la maison des beaux parents de Pascal, bien paumé au cœur de la petite île. Il en profite pour nous expliquer l’agencement traditionnel d’une maison vietnamienne, avec trois portes (dont une réservée aux esprits des défunts), un hôtel dédié à la mémoire et à l’adoration des ancêtres (obligatoire), un cadre d’Ho Chi Minh et un drapeau vietnamien (conseillés).
Les croyances vietnamiennes sont en général une tambouille entre bouddhisme, confucianisme et religion des ancêtres, saupoudrée de quelques vieilles superstitions. Les familles sont en charge des leurs ancêtres, doivent veiller sur eux. C’est au fils ainé d’une famille que revient la charge officielle de tous les défunts de la famille, comme un leg : il est le garant de la place toute particulière qu’ils vont avoir dans la maison, des offrandes régulières qui vont leur être octroyées, des bâtons d’encens qui vont être brûlé pour protéger la famille (ça, j’avoue ne plus savoir si ça a quelque chose à voir avec les ancêtres).
Lors d’un mariage, la nouvelle épouse change littéralement de famille. A partir de ce jour, elle n’est plus tenue de s’occuper de ses propres ancêtres, elle doit chouchouter ceux de son mari, qui sont devenus les siens. C’est pourquoi il est si important pour une famille d’avoir un fils, sinon les ancêtres seront un jour oubliés. Dans la vie de la famille, les ancêtres influencent les décisions importantes grâce à un système de pile ou face lancé devant leur hôtel. Bien sûr, on peut lancer trois fois la pièce, et s’arrêter quand le résultat convient !
Pascal nous raconte sa propre expérience. Après avoir été présenté aux parents de sa compagne, ces derniers lui ont demandé de fréquenter un vieux monsieur du village pour qu’il lui apprenne la langue et les coutumes. Un jour, ils l’ont convoqué pour lui dire qu’il fallait parler mariage (sans que le sujet n’ait jamais été abordé auparavant par le couple), et que la discussion aurait lieu le lendemain. Après une nuit sans sommeil, Pascal se retrouvait seul à côté du vieil homme, désigné comme sa famille en tant que tuteur, et face aux parents de sa douce, pour une négociation de deux heures à bâtons rompus entre les parties, sans qu’il ne pipe mot. A la fin, il lui a été annoncé que le mariage était accepté et arrangé. Tout avait été décidé, jusqu’à savoir qui paierait quoi dans le moindre détail ! Un sorcier a ensuite décidé du jour de mariage, à respecter absolument. Comme la date ne coïncidait pas avec les billets d’avions des parents de Pascal, le sorcier a accepté de changer le jour sacré (contre un petit billet).
La maison montre bien les marques du niveau d’eau lors des inondations d’automne, qui atteint souvent 2 mètres au dessus du sol. Toute la famille habite alors sous les toits pendant plusieurs jours. Pascal a même vu son toit arraché par un typhon il y a quelques années. Peinard.
Sur l’hôtel des ancêtres, des vases ont été confectionnés à partir de grosses douilles d'obus de la deuxième guerre mondiale. A l’époque, l’un d’eux avait explosé juste à côté de la maison, laissant un immense cratère sur la parcelle d’habitation.
Aujourd’hui, la "grand-mère" de Pascal, 86 ans, continue à travailler, dans la fabrication de nattes de lit à motifs en jonc. On la regarde bosser un moment, en binôme avec une autre femme autour d’un métier à tisser. Je ne sais pas comment elle fait pour ne pas se péter le dos. Au Vietnam, c’est généralement les femmes qui travaillent péniblement pendant que les hommes picolent. Je vais peut-être parler du pays à deux trois potes. Bon, c’est vrai que les hommes ont déjà beaucoup de responsabilité avec la charge de leurs ancêtres !
La balade à vélo continue jusqu’au bout de l’île. On emprunte un long pont de bambous flottant pour accéder à une île voisine, avant d’être initié à la confection des « bateaux paniers », puis à leur navigation sur un bout de rivière. Les embarcations toutes rondes sont assez difficiles à apprivoiser et la technique de rame assez singulière. Bon moment de rigolade, les enfants s’éclatent.
La promenade en vélo est vraiment agréable, les paysages colorés, les odeurs rassérénantes… un gros bol d’air. Elle nous permet aussi d’observer la technique de coloration des tiges de jonc, une fabrique artisanale de briques, un atelier de travail d’incrustation de la nacre dans les meubles, et un chantier de construction de bateaux en bois dont les plans se sont perdus et qui ne se transmet de tradition orale depuis des générations.
Pascal, insatiable, continue à nous abreuve d’anecdotes et d’informations. Il nous confirme qu’il ne faut pas s’amuser avec la justice du pays, intransigeante et pas souple du tout. Il est par exemple tenu d’obtenir l’accord des autorités avant d’accueillir des amis à dormir chez lui (ce qu’elle refuse souvent). La corruption est, elle, quasi inexistante selon lui. Le Lonely Planet parle pourtant de corruption généralisée à tous les niveaux de l’autorité !
Il nous explique qu’ici, le temps de travail n’est jamais pris en compte pour fixer le prix d’un produit ; seul la matière première (tissu, matériau) compte. Il nous raconte encore que les pétards ont été interdits au Vietnam suite à de trop nombreux accidents…mais que, pour perpétrer la tradition, les jeunes continuent à diffuser des bruits de pétards dans la rue, enregistrés sur des bandes de cassettes !
Autre anecdote culturelle, il nous raconte que les vietnamiens ne comprennent absolument pas pourquoi on s’excuse quand on fait tomber quelque chose ou qu’on bouscule quelqu’un… si on n’a pas fait exprès !
On finit par rentrer en bateau jusqu’à Hoi An en fin d’après-midi, sous un soleil déclinant. On remercie chaleureusement Pascal pour cette grosse journée, une chance de l’avoir passé en sa compagnie, ce gars est vraiment recommandable. Une dernière bière avec nos nouveaux copains toulousains sur la route. L’après-midi nous a rapproché et l’ambiance devenant très sympa, on décide de se retrouver un peu plus tard pour dîner.
Le temps de récupérer mon costume tout bien réajusté, les paires de chaussures terminées, et de s’arranger pour que le tout soit envoyé par avion chez ma mère (maman, si tu lis ces lignes, prépares toi à recevoir le bazar). Et de se rendre compte que la boutique de la robe d’Alice est déjà fermée, de la faire appeler par la meuf de la boutique voisine pour la faire revenir et nous ramener la robe terminée… un sacré merdier, mais on y arrive.
bouffe indienne avec les copains toulousains, ça parle voyages, bouffe, que des trucs réjouissants, on a passé une journée top.
Retour à l’hôtel : Federer m’a attendu pour se qualifier pour la finale olympique, en battant Del Potro19-17 au 3ème set… après 4h26 de jeu, le match le plus long qu’il n’y ait jamais eu en 2 sets gagnants de l’histoire.
Samedi 4 août - Hué
Au réveil, Florent Manaudou a arraché l’or. Well done.
Les JO se déroulant la nuit, je m’endors généralement avec les résultats de début de journée, et check les médailles au petit matin.
On passe la matinée dans un bus couchette qui relie Hoi An à Hué, un peu plus au nord.
On est tout serré, pas bien confort, il fait trop chaud et une bande de simili-hollandais coupe court à toutes nos velléités de dodo. En fait ils parlent une langue similaire, bien que plus désagréable à l'oreille (je ne pensais pas non plus que c'était possible). Et surtout, ils parlent fort !
De la gare routière de Hué, on rejoint le Google hôtel en taxi (un vrai cette fois). Le cadre est décontracté, le staff souriant, la chambre coquette, le lit dur comme du bois. On s'avale une mauvaise pizza et un banana split fondu au resto de l'hôtel, avant de se décider à quitter la ville en scooter pour aller découvrir les environs, caffis de tombeaux impériaux.
Pour resituer le truc, Hué était la capitale des empereurs de la dynastie Nguyen, qui ont régné (en partie à la solde des français) entre 1809 et 1968. Ça a a laissé quelques traces architecturales dans un bon rayon autour de la ville. Le dernier descendant de cette faste lignée est parti se réfugier aux États-Unis pour réparer des vélos, avant d'élire domicile en Europe, à Lyon, et devenir prothésiste dentaire. Triste destin.
On choisis l'option avec chauffeur, parce que 1) on a peur de se perdre dans les environs et de ne trouver aucun tombeau, et 2) on a peur tout court, on ne se sent pas d'affronter la circulation chaotique du centre ville. Alice est conduite par une fille à masque rose et grosses loutches, moi par un mec. Les deux n'hésitent pas à répondre au téléphone et à envoyer des textos en roulant à fond. On va faire des arrêts à 8 km au sud de la ville, puis à une quinzaine de km, pour visiter deux tombeau, celui de l'empereur Tu Duc et celui de Ming Mang. Ce qu'ils appèlent tombeaux sont en réalité d'immenses parcs naturels abritant forêts, lacs recouverts de fleurs de lotus, petits ponts de pierres, perroquets vert fluo, palais d'été, temples majestueux, abris pour pêcher ou réciter des poèmes, et, il est vrai, de grandes sépultures défraichies.
Le tombeau de l'empereur Tu Duc serait d'ailleurs vide, les 200 serviteurs chargés des funérailles ayant été décapité pour que le secret du véritable lieu ne soit jamais divulgué !
Les 2 mausolées sont globalement magnifique, avec des temples et autres bâtiments architecturaux extrêmement bien conservé, dans un cadre naturel sylvestre et apaisant, qui contraste avec l'effervescence du centre ville. Les piaillements d'oiseaux ont remplacé les Klaxon, et les paysages donnent l'impression d'être à l'intérieur d'une estampe chinoise.
Retour à la ville, sa circulation, ses étals de rue. Il fait vite nuit et on se réfugie dans un petit resto local où on mange bien et pas cher (nouilles de riz, bœuf aux poivrons et citronnelle).
Le soir, les équipes de double françaises de tennis nous régale de deux médailles
Dimanche 5 août
Lever un peu après 9h. On a la citadelle impériale dans le viseur de la journée. Une journée qui commence par un petit déjeuner à l'hôtel, avec un personnel tellement à la rue qu'ils ne nous servent qu'une petite moitié de la commande, déjà bien réinterprétée, sous fond de Techno dubstep à fond !
La citadelle est à une vingtaine de minutes à pied, on en franchit l'enceinte vers 10h30.
L'enceinte impériale, véritable citadelle dans la citadelle, contient tous les palais et bâtiments d'état d'époque. Enfin ce qu'il en reste, Les américains ayant fait une véritable boucherie ayant détruit 80% des bâtiments de la ville pour la "libérer". Après avoir lâché des tonnes de bombes, ils ont terminé les palais de la citadelle au napalm ! Bon trip.
Et ce qu'il en reste, c'est quand même pas mal... Avec une bonne dose d'imagination et d'explications permettant de se replonger dans la splendeur déchue du lieu. On passe presque 3h à arpenter les murs, les ruines et les temples. C'est presque décevant comparé aux mausolées de la veille, tellement bien conservés. Mais le lieu est chargé d'histoire et de gloire passée, certains temples à la mémoire des empereurs sont encore plein de majesté.
En sortant de l'enclave impériale par le mur nord, des Tuk-Tuk à vélo nous convainquent de partir pour une balade en leur compagnie afin de faire le tour de l'intérieur de la citadelle. Bamboule. Mon chauffeur parle un peu anglais, celui d'Alice (67 ans), on ne peut pas dire.
Temples, lacs, demeure de la famille d'Ho Chi Minh, le tout sous un soleil de plombs. Il fait tellement chaud que certains lieux sont fermés, les gardiens étant parti faire la sieste. La balade est sympa, ses ruelles plus tranquilles que la ville. Pour finir, Alice insiste pour transporter le vieux dans son propre Tuk-Tuk, ça l'éclate.
Il fait vraiment trop chaud, on finit par rentrer au Google assez tôt dans l'après-midi pour se mettre au frais dans la chambre.
Le soir, cocktail en observant l'ambiance de la rue, puis bon resto qui nous sert des spécialités de Hué : raviolis de riz aux crevettes, brochettes de porc à rouler comme des rouleaux de printemps et à tremper dans une sauce cacahouète, crêpe croustillante fourrée aux crevettes...
Je regarde la finale de tennis à la télé... Federer perd en finale, Murray triomphe chez lui. Dans la nuit, Usain Bolt conservera sa médaille d'or en 100m. Respect.
Et demain, on devrait traverser la frontière pour le Laos... si tout se passe bien.
Un titre peut-être un poil racoleur pour commencer ce nouveau récit, mais c'est de bonne guerre...
C'est à l'Asie du Sud Est que nous avons décidé de dire bonjour cet été. Pour moi c'est un peu un retour, ma précédente incursion dans les environs datant de 2007... même s'il est peu probable que je refoule les mêmes endroits. Pour Alice c'est une première en Asie !
Voici donc racontée la première étape de ce périple, au Vietnam. Le Vietnam du Sud cette fois. A noter que le titre de ce post n'a pas non plus aucun fondement : nos pas nous ont mené dans des villes commençant invariablement par la lettre H : Hong Kong, Ho Chi Minh Ville, Hoi An, Hué, ... comme par hasard.
Vendredi 27 juillet
Veille du départ… et première galère ! En fin d’après-midi, Go Voyage laisse un message sur mon portable : "rappelez d’urgence, tous les vols d’Aerosvit – compagnie ukrainienne – sont annulés jusqu’à nouvel ordre". Pas mal pour un début. Je rappelle, la meuf nous dégotte un nouvel aller-retour sur les mêmes dates, sur Cathay Pacific Airways, considérée comme une des meilleures compagnies au monde. On prend.
Samedi 28 juillet
Après 3 petites heures de sommeil et des sacs vite bouclés, TGV pour Paris avant d’embarquer dans l’avion et décoller. La Cathay Pacific, c’est plutôt pas mal en effet, mais loin du standing auquel on s’était habitué en partant à Dubaï en first (!). Je sors mon nouvel appareil photo pour me faire un peu à l’engin et me rend compte (galère n°2) que j’ai oublié d’y remettre la batterie après l’avoir chargé. C’est pas encore des trucs trop emmerdants, mais ça augure d’un bon niveau pour la suite ! Alice me lance déjà des regards qui tuent, genre "qu’est ce que tu nous prépares pour la suite"… On a quand même du mal à trouver le sommeil.
Dimanche 29 juillet - Hong Kong
Arrivée à Hong Kong à 7h locales. Pour nous il est 1h, et on n’a dormi moins de 2h chacun : le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on n’est pas frais frais, et on a 8h à poireauter ici. Alice sort fumer une clope, on se prend une chaleur de fou avec 90% d’humidité dans l’air… j’avais oublié. On rentre vite dans l’aéroport prendre le Shuttle express climatisé qui nous débarque en plein centre ville sur l’île de Hong Kong. Balade au milieu de la jungle urbaine et des buildings géants, traversée de dizaines de centres commerciaux aux boutiques de luxe, petit café dans un Starbuck. Il est tôt, les magasins ne sont pas encore ouverts, mais tous les vendeurs sont déjà en tenue. Dans le nouvel Applestore de la Hong Kong Station, un manageur est en pleine imprécation, il galvanise les troupes, probablement en leur rappelant bien haut les valeurs de la boite et les préceptes de ventes de Steve Jobs… les employés transis applaudissent chaque diatribe à l’unisson.
Balade en hauteur sur les ponts piétons au dessus des voies express ultra bruyantes. De nombreux Hong Kongais s’y relaxent dans des parcelles de cartons aménagées à même le sol. Passage dans le « quartier des escalators », ou Pierre m’avait hébergé en 2005… souvenirs. Sur une section en hauteur, tous les passants se pressent pour observer la rue en contrebas : des dizaines de flics ont barré la rue et sont en train de faire une perquisition… un gang mafieux déguisé en poissonniers ? On s’invente des films, on est en plein dedans.
Le vieux ferry permet toujours de franchir la baie pour rejoindre la péninsule de Kowloon, embarquement. Sur l’autre rive, encore des buildings sans discontinuer, et toujours cette touffeur, qu’on fuit en traversant des malls. J’achète une nouvelle batterie pour appareil photo, en trois secondes et pas chère. Le passage à HK aura au moins servi à ça. C’est assommé de fatigue qu’on finit par repartir en direction de l’aéroport.
Nouveau vol sans encombre avec Vietnam Airlines, atterrissage à Ho Chi Minh vers 17h30. On change un peu d’Euros en Dongs (1€ = 25 000D) et on arrive à se faufiler entre les taxis pour prendre de bus n°152 (presque gratuit) direction le centre ville. Le truc le plus frappant est le nombre spectaculaire de scooters dans les rues, à chaque croisement, qui se faufile en masse, de manière absolument chaotique. Ca me semble encore plus impressionnant qu’à Hanoi il y a 7 ans. On est lâché à Pham Ngu Lao, le quartier des routards, en plein centre, avec des hôtels accessibles. Le quartier grouille de touristes, mais aussi de population locale. Les trottoirs sont assiégés par les scooters garés, les rues par les scooters en mouvement, qui zigzaguent pour nous doubler en klaxonnant. De nombreux hôtels sont blindés, un tenancier gentil passe plein de coups de fil pour nous jusqu’à trouver une chambre libre dans un hôtel pas loin, le Victoria hôtel, qui vient d’ouvrir.
Bien installés dans une chambre climatisée pas chère avec clim, wifi, télé… une bonne douche et c’est reparti, histoire de boire un coup et prendre la température du bazar avant de « tilter » pour de bon. Il fait chaud mais plutôt bon, et beaucoup moins humide qu’à HK. Petit café d’angle, je retrouve la joie de la Tiger beer, Alice se régale d’un cocktail maison à bas de fruits frais. On est arrivé, on est bien. Mais quand même alpagué sans arrêt par des vendeurs de lunettes, de cigarettes et autres « denrées à touristes ». Un vendeur de clope vient plus prêt de moi : « Malawane ? ». Je ne comprends pas. Il sort de sa poche un gros bloc de Marijuana. A ok pardon. Il s’éloigne, on rigole avec Alice et on se dit qu’il est quand même peu probable qu’on nous propose toutes les drogues existantes en pleine rue dans un pays à la justice si sévère. Deux minutes plus tard, un autre : « Cigarettes ! ». Il s’approche… « Malawane ! »… plus prêt, en chuchotant : « Cocane ? ». Cette fois on a compris… on hallucine.
Lundi 30 juillet - Ho Chi Minh Ville
Réveil vers 11h, on avait besoin de rattraper le gros retard de sommeil accumulé.
Direction la jungle urbaine, sans plus attendre. Traverser chaque rue à pied devient vite un challenge, un jeu dans lequel on a l’impression de risquer sa vie à chaque partie. Aucun feu, enfin si, de rares fois, mais pas vraiment respecté. Les deux roues se faufilent partout à la moindre opportunité. On n’a guère le choix que de s’engager en croisant les doigts pour que les motos nous esquivent.
Balade dans le quartier de Dong Khoi, quartier du centre ville bordant la rivière Sai Gon. Des hôtels luxueux et boutiques de luxe y côtoient des marchés de rues, des magasins d’antiquités et une vie à mille à l’heure. On goûte un mangoustan frais, fruit aussi délicieux que dans mes souvenirs. Le quartier est dominé par le building de la bitexco, on y monte pour admirer la ville. Juste au dessus de nous (vers le 50ème étage), un immense héliport protubérant se détache de la tour. On apprendra par la suite que les hélicos n'ont finalement jamais été autorisés à y atterrir ! Nos pas nous entrainent dans la rue des tailleurs, puis dans celle des godasses… l'Asie n’a pas perdu sa bonne vieille habitude des rues à thèmes.
Dans de longs parcs, les habitants jouent aux dames chinoises, au ballon ou au badminton. Grimpée dans un bar lounge au 23ème étage d’un building, dégustation de thé vietnamien alors qu’une averse de mousson inonde la ville à l’extérieur. Mais ça ne dure pas et le soleil revient… par intermittences.
Nouvelle étape à pieds, les klaxons et les bruits de rue deviennent pénibles, les traversées demandent de plus en plus de concentration. Les trottoirs sont devenus des parkings à scooter, il y a même des « scooteriers » pour garer les véhicules devant les cafés, vu le peu de place qu’il reste. Les vietnamiens sont nombreux à porter des masques, pour se protéger de la pollution tout en gardant bien sagement ses microbes, mais surtout pour éviter de bronzer : leur pire cauchemar, ça fait bouseux. Les filles rivalisent de créativité pour rendre ça coquet, avec des masques Lacoste ou Gucci décorés avec des fleurs et des petits oiseaux. Genre je me déguise en Hannibal Lecteur, mais faut que je reste mignonne (pas gagné). On croise aussi, histoire oblige, un nombre assez important de culs de jatte qui se déplacent avec d’ingénieuses voiturettes à mains.
Retour à l’hôtel, temps de réflexion sur la suite à donner au voyage, discussion super sympa avec la meuf de l’hôtel, à qui j’apprends les frontières du Laos et du Vietnam sur une carte, réservation de train et booking d’hôtel sur l’iPad (nouveau gadget qu’on na pas finit de trouver bien utile, même s’il nous enferme un peu plus chaque jour dans la prison dorée de la Pomme).
On va manger à côté, dans un établissement conseillé par la taulière, qui ne paye pas de mine, mais dans lequel on déguste d’excellents Pho, soupe de nouilles de riz dans un bouillon délicieusement épicé, dans lequel on ajoute des morceaux de bœuf ou de poulet, du citron lime, du piment, des pousses de soja, des feuilles de basilic poivrées… on n’en laisse pas une goutte, un régal.
Dans un étal de rue à côté, une mamie prépare des sandwiches (banh-mi). Je lui demande ce qu’elle met dedans : « mitba ». Je comprends en regardant la casserole, ce sont des boulettes de viandes (meat ball).
Dans la chambre d’hôtel, on se paye une tranche de JO à télé : haltérophilie, pingpong et plongeon synchronisé, ...
Mardi 31 juillet
Réveil vers 10h30. Dire que j’ai passé une nuit de merde serait minimiser le truc. Nuit pourrie donc, grosse insomnie… le décalage horaire ne semble pas tout à fait digéré.
Retour rapide dans la jungle urbaine d'Ho Chi Minh City. On suit les conseils du Lonely pour aller déjeuner au Nha Hang Ngon, de la cuisine de rue sublimée devant nos yeux. Bouffe vraiment top, des choses qui semblent simples (nems, ailes de poulet, riz gluant, sauces soja et nuoc cham..) mais avec à chaque fois le petit goût en plus, l’assaisonnement idéal et créatif, un mélange de saveur imprévu sucré salé…
Visite du Palais de l'Indépendance, austère bâtiment au milieu d’un grand parc, qui semble figé dans les années 70, au moment de sa libération par l’armée communiste. Une jolie guide à longue robe rouge moulante nous fait la visite, tout est fait pour mettre en scène le courage de ceux par qui le pays a été libéré des français, puis des américains. Salles de réception de haut standing, tableaux et meubles laqués, statues à la gloire d’Ho Chi Minh, drapeaux rouges à l'étoile jaune, bunker en sous-sol avec cartes secrètes, documents jaunis sur lesquels les troupes sont recensées, salles de commandement et de télécommunications (2 téléphones). Sur la terrasse stationne un hélico d'époque. On est en plein James Bond. Dans le parc autour, répliques des tanks libérateurs superstars, avions de guerre et... terrain de tennis (?)
On enchaine avec le musée des souvenirs de guerre. Un bâtiment de deux étages lui aussi entouré de vieux tanks, chars et avions de guerre à étoile. Le musée est principalement constitué de photos datant de la guerre du Vietnam. On y voit de manière on ne peut plus crue les atrocités commises pendant la guerre par l’armée américaine : tortures, tirs sur des femmes et enfants tentant de fuir, propagation d’agent orange dans les campagnes (et nombreuses conséquences catastrophiques), forêts détruites au napalm, intoxications diverses… tout ça illustré de témoignages divers, de textes de lois, d’aveux, de chiffres macabres et de statistiques morbides. On a conscience que le musée est on ne peut plus partial dans sa vision des événements, mais je ne suis malheureusement pas persuadé qu’il y ait la moindre exagération dans tout ça.
C’est le cœur un peu retourné qu’on monte dans un taxi relou au compteur trafiqué (il défile de manière totalement excessive) qui nous entube correctement. Petit tour dans la Pagode de l'empereur de Jade, avec possibilité d’acheter des poissons et des tortues pour les jeter dans des bassins en offrande à je ne sais quelle divinité. Problème, les bassins sont blindés et les bestioles semblent y crever d’étouffement. A l’intérieur, des gros bouddhas, des sculptures fines sur bois d'ébène, l’odeur d'encens, et des mec cheulous.
Retour à la guerre (de la rue) et à la joie des traversées hasardeuses. Alice tique sur une boutique de fringue et s'achète des t-shirts branchouille. On grimpe au 6ème étage d'un immeuble pour se boire un cocktail en plein happy hour dans un bar classieux, près du « lac de la tortue ». Environ 4 serveurs pour chaque client, on ne pensait pas être aussi attendu.
Le temps est incertain, toujours changeant, nuageux avec de belles éclaircies et un vent chaud. L’agréable fraîcheur en soirée vient contrebalancer la lourdeur du jour, elle-même contrebalancée par une clim’ exagérément froide dans tous les intérieurs.
On retourne dîner au Nha Hang Ngon, qui avait clairement un goût de reviens-y. Rouleaux de printemps exquis, Pho de qualité, bière Saigon. On y est.
Retour à pied il fait nuit, la ville est dans son rythme nocturne, boutiques, bars, Night clubs. Les couples viennent par centaines garer leur deux roues le long des parcs, rester dessus à discuter et se "tripoter sur le scooter", occupation agrée semble-t-il par tous, loin du plan loose qu'il ne manquerait pas de représenter chez nous.
A 22h, un taxi vient nous prendre à l’hôtel pour nous emmener à la gare d’Ho Chi Minh. Et c’est parti pour 16h de trajet dans un lit couchette, dans une cabine de 4 personnes. Alice et moi sommes en haut, et en dessous c’est toute une famille qui s’est agglutinée et qui parle fort (et viet). J'écris ces lignes allongé, avec mon iPhone… aidez moi à m’extraire du pouvoir de la Pomme !
Mercredi 1er août - Hoi An
Pendant la nuit, Thomas m’a fait vivre en direct la victoire épique de Tsonga contre Raonic aux JO, en streaming texto. Environ 30 textos, et la note du film risque d’être assez salée ! Il en profite pour me faire croire que Teddy Riner a été suspendu pour dopage. Me prend vraiment pour un con.
Arrivée vers 15h à Da Nang, ville du centre du pays, beaucoup plus au nord. On cherche un moyen de rejoindre Hoi An, à quelques 30 km de là. Les bus sont introuvables et les taxis chers. On arrive à trouver un gars louche qui nous propose une place au rabais dans un van, avec un autre espagnol… mais on doit attendre. De plus en plus louche, mais le truc fonctionne parfaitement ! Le van longe la mer de Chine, et passe à côté de fabriques d’objets en marbres, provenant d’une immense carrière de marbre, dans le coin.
En arrivant dans la veille ville de Hoi An, un truc saute aux yeux : le nombre d’enseignes de tailleurs, environ une boutique sur deux ! C’est donc la capitale du sur mesure. Mais je ne pense pas qu’on se laissera tenter.
On élit domicile à l’hôtel Than Van, en plein cœur de ville (avec même une piscine dans le patio central), avant d’aller flâner alentours. Rien à voir avec Ho Chi Minh, la ville est beaucoup plus calme, mignonne comme tout, avec moins de scooter (mais quand même), plus de vélos, et même des mobylettes électriques, pour le grand plaisir d’Alice. Petits ponts cosy, arbres en fleur, nombreux lampions multicolores accrochés à toutes les façades, temples, vieilles demeures. Le tout nimbé d’une ambiance assez bucolique, avec une rivière coupant la vieille ville en deux.
On va quand même se renseigner sur les prix chez un tailleur. Résultat : un costume complet avec chemise commandés sur le champ. Modèle Hugo Boss. Alice a réussie à ne pas craquer. On rentre dans une autre boutique, celle de la sœur du chauffeur qui nous a amené en ville. Souriante, sympa, tranquille. Quand Alice en sort, elle a commandé une robe sur mesure ! Va pas falloir rester là trop longtemps.
On est bien tombé : ce soir, c’est une fête nationale ou locale truc machin. Enfin je sais pas trop quoi, mais c’est une fois par mois, et à cette occasion la ville n’émet pas d’autre lumière que celle des lampions et des bougies flottantes déposées par de longues tiges dans l’eau de la rivière, depuis le pont central. C’est le merdier, plein de monde partout, mais l’atmosphère est assez magique et festive. Un groupe joue de la musique traditionnelle. Le patelin est vraiment joli, même si à l’heure du dîner le nombre de touristes est assez étouffant.
On se promène un peu avant de se laisser tenter par le Morning Glory et son mélange de cuisine vietnamienne et occidentale. Là aussi, des tentatives de fusion culinaires, plus ou moins glorieuses (malgré le nom). En fait tout est bon et alléchant sur le papier (mousse de crevettes dans un bâton de sucre de canne, …) mais rien véritablement extraordinaire. On se dit quand même qu’on s’est plus qu’embourgeoisé, il va falloir revenir à la bonne vieille routardise bien vite (ou je risque de perdre mes plus fidèles lecteurs) !
Jeudi 2 août
Lever vers 9h30. Petit déjeuner à côté de la piscine.
Balade dans les rues, visite d’une « manufacture artisanale » payante, qui ne contient en fait que des boutiques ! Ils sont vraiment bons.
Visite d’une vieille maison de famille, avec puits de lumière, meubles décorés avec des idéogrammes de nacre en forme d’oiseaux, hôtel à la mémoire des 7 générations d’ancêtres…
Visite de jolis temples, grande fontaine de pierre en forme de serpent, tortillons d’encens suspendus, statues de bouddhas, corbeilles d’offrandes de fruits. Et puis un pont de bois japonais, avec un temple au milieu.
Il fait plus que chaud dehors et il est à peine midi. Dans le centre du Vietnam, la saison des pluies dure d’octobre à décembre, le reste du temps il fait chaud et plutôt sec. Pose jus de citron frais dans un petit rade encore en construction.
Petite pause décontraction piscine à l’hôtel, le temps que le soleil calme ses ardeurs.
Retour chez Kimmy, mon tailleur. Riche, à n’en pas douter, vu l’affluence qui se presse dans l’enseigne. Ma « costumière » m’apporte mon costume et ma chemise. Essai. Claaaaase. Bon, pour elle il y a des imperfections, elle met des coups de craie partout pour procéder aux réajustements : épaulettes, cintrage à la taille et aux manches, bas de pantalon, bas de veste, … l’ensemble lui est donc rendu pour les retouches. Mais quand même, me dit-elle, ce serait dommage d’avoir un si beau costume sans les belles chaussures sur mesures qui vont avec, non ? Quand même pas. Mais c’est combien ? Ah, et c’est ta sœur qui fait les chaussures ? Elle m’accompagne avec une bonne main au cul. C’est une très bonne vendeuse.
Vu qu’on est bon pigeon, je ressors de chez la sœur avec une paire de mocassins en fabrication… et Alice une paire de belle chaussure à talon… et une autre paire de ballerines ! Sortez-nous d’ici, on devient complètement cons.
Vendredi 3 août
Premier réveil forcé : une fanfare passe dans la rue à côté de l’hôtel, avec chants, tambours, cuivres… il est 5h25 ! Ils sont fous ces viets.
Deuxième réveil programmé : un peu avant 7h. On rejoint l’agence Heaven & Earth tenue par Pacal, un français, et sa femme vietnamienne, qui sont venus s’installer ici il ya 4 ans, après avoir vécu 12 ans en France (et fais 2 gosses, 6 et 12 ans). On part donc à vélo dans la campagne environnante avec deux couples plus âgés, un nippon et un australien (à en croire la ressemblance frappante de la meuf avec Samanta Stosur… à y bien réfléchir, il est même hautement probable que ce soit sa sœur), accompagné par Thé, vietnamienne anglophone bien rigolote, et Pascal, rien que pour nous. Le parcours s’étend sur une dizaine de km, sur des petits chemins paumés entre les rizières, sous le regard un peu ahuris des buffles d’eau.
La présence de Pascal est précieuse. Il nous fait partager son expérience de la région et nous éclaire sur le mode de vie des paysans vietnamiens, la récolte du riz, l’entraide dans les familles, les croyances et superstitions locales, les conséquences des inondations récurrentes qui sévissent pendant la saison des pluies (entre octobre et décembre localement), le coût de l’immobilier, l’évolution des mentalités, les fêtes traditionnelles… et plein d’’autres sujets passionnants. On a également l’occasion d’observer la production artisanale de Cao Lầu, la plus fameuse nouille de riz de Hoi An dans une petite maison familiale, avant de se faire enseigner le nom de nombreuses herbes et plantes locales dans une ferme de village. On passe un moment à observer les paysans vaquer à leurs tâches sous un soleil de plombs, loin du tumulte et des klaxons de la ville. Une belle leçon d’humilité, et on se sent pour la première fois du voyage véritablement immergé.
De retour en ville vers 10h, Pascal nous laisse les vélos… le temps d’aller se rafraichir dans la piscine (le soleil tabasse déjà, le thermomètre affiche plus de 35°).
On repart avec lui pour un tour plus long l’après-midi. Une petite famille toulousaine nous tient cette fois compagnie, Véronique, et Salim, la quarantaine, avec leurs enfants Yasmine (10 ans) et Sammy (7 ans), fins cool. On est aussi accompagné par Bhé, assistante de Pascal, qui essaye d’apprendre le français mais en chie, et qui nous fait vraiment marrer.
Dans un premier temps, on embarque avec les vélos sur un bateau qui nous porte sur la rivière pendant 45 minutes et nous débarque sur une île sans aucune route. Pendant le trajet, les nuages se sont amoncelés et une grosse averse est tombée. Ça rafraichit l’atmosphère. On roule jusqu’à la maison des beaux parents de Pascal, bien paumé au cœur de la petite île. Il en profite pour nous expliquer l’agencement traditionnel d’une maison vietnamienne, avec trois portes (dont une réservée aux esprits des défunts), un hôtel dédié à la mémoire et à l’adoration des ancêtres (obligatoire), un cadre d’Ho Chi Minh et un drapeau vietnamien (conseillés).
Les croyances vietnamiennes sont en général une tambouille entre bouddhisme, confucianisme et religion des ancêtres, saupoudrée de quelques vieilles superstitions. Les familles sont en charge des leurs ancêtres, doivent veiller sur eux. C’est au fils ainé d’une famille que revient la charge officielle de tous les défunts de la famille, comme un leg : il est le garant de la place toute particulière qu’ils vont avoir dans la maison, des offrandes régulières qui vont leur être octroyées, des bâtons d’encens qui vont être brûlé pour protéger la famille (ça, j’avoue ne plus savoir si ça a quelque chose à voir avec les ancêtres).
Lors d’un mariage, la nouvelle épouse change littéralement de famille. A partir de ce jour, elle n’est plus tenue de s’occuper de ses propres ancêtres, elle doit chouchouter ceux de son mari, qui sont devenus les siens. C’est pourquoi il est si important pour une famille d’avoir un fils, sinon les ancêtres seront un jour oubliés. Dans la vie de la famille, les ancêtres influencent les décisions importantes grâce à un système de pile ou face lancé devant leur hôtel. Bien sûr, on peut lancer trois fois la pièce, et s’arrêter quand le résultat convient !
Pascal nous raconte sa propre expérience. Après avoir été présenté aux parents de sa compagne, ces derniers lui ont demandé de fréquenter un vieux monsieur du village pour qu’il lui apprenne la langue et les coutumes. Un jour, ils l’ont convoqué pour lui dire qu’il fallait parler mariage (sans que le sujet n’ait jamais été abordé auparavant par le couple), et que la discussion aurait lieu le lendemain. Après une nuit sans sommeil, Pascal se retrouvait seul à côté du vieil homme, désigné comme sa famille en tant que tuteur, et face aux parents de sa douce, pour une négociation de deux heures à bâtons rompus entre les parties, sans qu’il ne pipe mot. A la fin, il lui a été annoncé que le mariage était accepté et arrangé. Tout avait été décidé, jusqu’à savoir qui paierait quoi dans le moindre détail ! Un sorcier a ensuite décidé du jour de mariage, à respecter absolument. Comme la date ne coïncidait pas avec les billets d’avions des parents de Pascal, le sorcier a accepté de changer le jour sacré (contre un petit billet).
La maison montre bien les marques du niveau d’eau lors des inondations d’automne, qui atteint souvent 2 mètres au dessus du sol. Toute la famille habite alors sous les toits pendant plusieurs jours. Pascal a même vu son toit arraché par un typhon il y a quelques années. Peinard.
Sur l’hôtel des ancêtres, des vases ont été confectionnés à partir de grosses douilles d'obus de la deuxième guerre mondiale. A l’époque, l’un d’eux avait explosé juste à côté de la maison, laissant un immense cratère sur la parcelle d’habitation.
Aujourd’hui, la "grand-mère" de Pascal, 86 ans, continue à travailler, dans la fabrication de nattes de lit à motifs en jonc. On la regarde bosser un moment, en binôme avec une autre femme autour d’un métier à tisser. Je ne sais pas comment elle fait pour ne pas se péter le dos. Au Vietnam, c’est généralement les femmes qui travaillent péniblement pendant que les hommes picolent. Je vais peut-être parler du pays à deux trois potes. Bon, c’est vrai que les hommes ont déjà beaucoup de responsabilité avec la charge de leurs ancêtres !
La balade à vélo continue jusqu’au bout de l’île. On emprunte un long pont de bambous flottant pour accéder à une île voisine, avant d’être initié à la confection des « bateaux paniers », puis à leur navigation sur un bout de rivière. Les embarcations toutes rondes sont assez difficiles à apprivoiser et la technique de rame assez singulière. Bon moment de rigolade, les enfants s’éclatent.
La promenade en vélo est vraiment agréable, les paysages colorés, les odeurs rassérénantes… un gros bol d’air. Elle nous permet aussi d’observer la technique de coloration des tiges de jonc, une fabrique artisanale de briques, un atelier de travail d’incrustation de la nacre dans les meubles, et un chantier de construction de bateaux en bois dont les plans se sont perdus et qui ne se transmet de tradition orale depuis des générations.
Pascal, insatiable, continue à nous abreuve d’anecdotes et d’informations. Il nous confirme qu’il ne faut pas s’amuser avec la justice du pays, intransigeante et pas souple du tout. Il est par exemple tenu d’obtenir l’accord des autorités avant d’accueillir des amis à dormir chez lui (ce qu’elle refuse souvent). La corruption est, elle, quasi inexistante selon lui. Le Lonely Planet parle pourtant de corruption généralisée à tous les niveaux de l’autorité !
Il nous explique qu’ici, le temps de travail n’est jamais pris en compte pour fixer le prix d’un produit ; seul la matière première (tissu, matériau) compte. Il nous raconte encore que les pétards ont été interdits au Vietnam suite à de trop nombreux accidents…mais que, pour perpétrer la tradition, les jeunes continuent à diffuser des bruits de pétards dans la rue, enregistrés sur des bandes de cassettes !
Autre anecdote culturelle, il nous raconte que les vietnamiens ne comprennent absolument pas pourquoi on s’excuse quand on fait tomber quelque chose ou qu’on bouscule quelqu’un… si on n’a pas fait exprès !
On finit par rentrer en bateau jusqu’à Hoi An en fin d’après-midi, sous un soleil déclinant. On remercie chaleureusement Pascal pour cette grosse journée, une chance de l’avoir passé en sa compagnie, ce gars est vraiment recommandable. Une dernière bière avec nos nouveaux copains toulousains sur la route. L’après-midi nous a rapproché et l’ambiance devenant très sympa, on décide de se retrouver un peu plus tard pour dîner.
Le temps de récupérer mon costume tout bien réajusté, les paires de chaussures terminées, et de s’arranger pour que le tout soit envoyé par avion chez ma mère (maman, si tu lis ces lignes, prépares toi à recevoir le bazar). Et de se rendre compte que la boutique de la robe d’Alice est déjà fermée, de la faire appeler par la meuf de la boutique voisine pour la faire revenir et nous ramener la robe terminée… un sacré merdier, mais on y arrive.
bouffe indienne avec les copains toulousains, ça parle voyages, bouffe, que des trucs réjouissants, on a passé une journée top.
Retour à l’hôtel : Federer m’a attendu pour se qualifier pour la finale olympique, en battant Del Potro19-17 au 3ème set… après 4h26 de jeu, le match le plus long qu’il n’y ait jamais eu en 2 sets gagnants de l’histoire.
Samedi 4 août - Hué
Au réveil, Florent Manaudou a arraché l’or. Well done.
Les JO se déroulant la nuit, je m’endors généralement avec les résultats de début de journée, et check les médailles au petit matin.
On passe la matinée dans un bus couchette qui relie Hoi An à Hué, un peu plus au nord.
On est tout serré, pas bien confort, il fait trop chaud et une bande de simili-hollandais coupe court à toutes nos velléités de dodo. En fait ils parlent une langue similaire, bien que plus désagréable à l'oreille (je ne pensais pas non plus que c'était possible). Et surtout, ils parlent fort !
De la gare routière de Hué, on rejoint le Google hôtel en taxi (un vrai cette fois). Le cadre est décontracté, le staff souriant, la chambre coquette, le lit dur comme du bois. On s'avale une mauvaise pizza et un banana split fondu au resto de l'hôtel, avant de se décider à quitter la ville en scooter pour aller découvrir les environs, caffis de tombeaux impériaux.
Pour resituer le truc, Hué était la capitale des empereurs de la dynastie Nguyen, qui ont régné (en partie à la solde des français) entre 1809 et 1968. Ça a a laissé quelques traces architecturales dans un bon rayon autour de la ville. Le dernier descendant de cette faste lignée est parti se réfugier aux États-Unis pour réparer des vélos, avant d'élire domicile en Europe, à Lyon, et devenir prothésiste dentaire. Triste destin.
On choisis l'option avec chauffeur, parce que 1) on a peur de se perdre dans les environs et de ne trouver aucun tombeau, et 2) on a peur tout court, on ne se sent pas d'affronter la circulation chaotique du centre ville. Alice est conduite par une fille à masque rose et grosses loutches, moi par un mec. Les deux n'hésitent pas à répondre au téléphone et à envoyer des textos en roulant à fond. On va faire des arrêts à 8 km au sud de la ville, puis à une quinzaine de km, pour visiter deux tombeau, celui de l'empereur Tu Duc et celui de Ming Mang. Ce qu'ils appèlent tombeaux sont en réalité d'immenses parcs naturels abritant forêts, lacs recouverts de fleurs de lotus, petits ponts de pierres, perroquets vert fluo, palais d'été, temples majestueux, abris pour pêcher ou réciter des poèmes, et, il est vrai, de grandes sépultures défraichies.
Le tombeau de l'empereur Tu Duc serait d'ailleurs vide, les 200 serviteurs chargés des funérailles ayant été décapité pour que le secret du véritable lieu ne soit jamais divulgué !
Les 2 mausolées sont globalement magnifique, avec des temples et autres bâtiments architecturaux extrêmement bien conservé, dans un cadre naturel sylvestre et apaisant, qui contraste avec l'effervescence du centre ville. Les piaillements d'oiseaux ont remplacé les Klaxon, et les paysages donnent l'impression d'être à l'intérieur d'une estampe chinoise.
Retour à la ville, sa circulation, ses étals de rue. Il fait vite nuit et on se réfugie dans un petit resto local où on mange bien et pas cher (nouilles de riz, bœuf aux poivrons et citronnelle).
Le soir, les équipes de double françaises de tennis nous régale de deux médailles
Dimanche 5 août
Lever un peu après 9h. On a la citadelle impériale dans le viseur de la journée. Une journée qui commence par un petit déjeuner à l'hôtel, avec un personnel tellement à la rue qu'ils ne nous servent qu'une petite moitié de la commande, déjà bien réinterprétée, sous fond de Techno dubstep à fond !
La citadelle est à une vingtaine de minutes à pied, on en franchit l'enceinte vers 10h30.
L'enceinte impériale, véritable citadelle dans la citadelle, contient tous les palais et bâtiments d'état d'époque. Enfin ce qu'il en reste, Les américains ayant fait une véritable boucherie ayant détruit 80% des bâtiments de la ville pour la "libérer". Après avoir lâché des tonnes de bombes, ils ont terminé les palais de la citadelle au napalm ! Bon trip.
Et ce qu'il en reste, c'est quand même pas mal... Avec une bonne dose d'imagination et d'explications permettant de se replonger dans la splendeur déchue du lieu. On passe presque 3h à arpenter les murs, les ruines et les temples. C'est presque décevant comparé aux mausolées de la veille, tellement bien conservés. Mais le lieu est chargé d'histoire et de gloire passée, certains temples à la mémoire des empereurs sont encore plein de majesté.
En sortant de l'enclave impériale par le mur nord, des Tuk-Tuk à vélo nous convainquent de partir pour une balade en leur compagnie afin de faire le tour de l'intérieur de la citadelle. Bamboule. Mon chauffeur parle un peu anglais, celui d'Alice (67 ans), on ne peut pas dire.
Temples, lacs, demeure de la famille d'Ho Chi Minh, le tout sous un soleil de plombs. Il fait tellement chaud que certains lieux sont fermés, les gardiens étant parti faire la sieste. La balade est sympa, ses ruelles plus tranquilles que la ville. Pour finir, Alice insiste pour transporter le vieux dans son propre Tuk-Tuk, ça l'éclate.
Il fait vraiment trop chaud, on finit par rentrer au Google assez tôt dans l'après-midi pour se mettre au frais dans la chambre.
Le soir, cocktail en observant l'ambiance de la rue, puis bon resto qui nous sert des spécialités de Hué : raviolis de riz aux crevettes, brochettes de porc à rouler comme des rouleaux de printemps et à tremper dans une sauce cacahouète, crêpe croustillante fourrée aux crevettes...
Je regarde la finale de tennis à la télé... Federer perd en finale, Murray triomphe chez lui. Dans la nuit, Usain Bolt conservera sa médaille d'or en 100m. Respect.
Et demain, on devrait traverser la frontière pour le Laos... si tout se passe bien.
1 commentaire:
Salut le gang des H, ca a l'air top et ton récit me rappelle tellement de souvenirs...
ps: je me suis fait avoir aussi pour le costard à dan han en 2007! mais vu le prix ca vaut vraiment le coup!
Profitez en bien!
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