14 août 2007

"Des Retrouvailles et des Adieux"

Je ne suis plus très loin du Myanmar. Tout près même. Si tout se passe bien, j'y serai demain matin. Une semaine s'est écoulée, déjà. Une semaine commencée par les douces retrouvailles avec Fan Ling, terminée par les adieux déchirants aussi. Une relation étonnante, naïve, compliquée, belle, triste et probablement vaine. Une relation d'une semaine entre un français de 28 ans et une chinoise de 24 ans. Une relation racontée le plus fidèlement (et subjectivement) possible dans les lignes qui suivent...

Lundi 13 août - Kunming /10h36

On est toujours Jeudi 9. Je suis dans le bus. Il arrive a Mengzi. Je redoute un peu. Et si je ne la reconnaissais pas ? Et si on avait plus rien a se dire ? Et si c'était un foirage intégral ? Il est un peu tard bien sur, il faut savoir garder du recul et vivre l'instant, on verra bien. Le minibus s'arrête, je la cherche du regard a travers les vitres, ne la vois pas. Je sors, récupère mes bagages, fais un petit tour... non, elle ne semble pas être arrivée. Le bus a un peu d'avance, il est 19h25. La gare routière est totalement nouvelle, beaucoup plus grande et moderne que celle que j'avais fréquentée deux ans auparavant. A l'instar des routes, spacieuses, a double voie, avec de grands lampadaires. J'avais l'image d'un village, et c'est devenu une grande ville... tout va vraiment très vite ici. Je m'assois, en essayant de calmer mon enthousiasme (ma peur ?). Et puis la voila, je la reconnais. De blanc vêtue, les cheveux un peu plus courts, me cherchant du regard d'un pas mal assure. Troublant. Je lui fais un signe, elle s'approche, me souris. Je me levé et la prends dans mes bras. Elle, de marbre. Ok, rien n'a vraiment change ! On échange quelques phrases un peu timides. Je lui dis que je suis très heureux qu on finisse par se revoir. Elle acquiesce. Elle me dis qu'elle vient d'appeler la sœur de sa grand-mère qui est ok pour me loger... ok, bon trip. On s'y rend en taxi. La fameuse vieille fille habite seule dans un petit appartement mignon du nouveau quartier moderne de la ville, il y a 3 chambres. Elle est avec un ami de son âge, les deux vieux me sourient, je sens que je leur inspire confiance. Ils posent des questions a Ling (c'est le prénom dans Fan Ling) sur moi, je sors deux-trois mots en chinois, ça les fait rire. Les affaires posées, on sors dehors pour manger un bout, un bon bol de nouilles de riz et un jus de citron. La situation me semble quelque peu irréelle, je suis en face de Fan Ling quoi, c'est pas rien. Je lui pose des tas de questions sur elle, sur son année a l'université du Jiangsu (près de ShangHai), tout ça. Ses réponses ne sont majoritairement tristes : elle est souvent triste, elle s'est fait vole plein d'argent par une coturne, elle travaille beaucoup, elle ne sait pas quoi faire de sa vie, elle ne fait rien depuis qu'elle est rentrée a Mengzi, elle s'ennuie. J'essaye d'être positif, de lui remonter le moral, je lui dis que je suis la, que c'est quand même la meilleure chose qui pouvait lui arriver et qu'on va passer des supers journées ensembles... bon, ça la fait sourire un peu.

De retour chez l'ancienne (une petite voûtée ridée et souriante), je me rend compte que je pue. Bon, ça arrive. J'en touche diplomatiquement un mot a Ling qui m'arrange la salle de bain pour que je puisse m'y doucher. J'emprunte aussi une serviette, j'ai oublie la mienne a Lhassa. Lorsque je sors de la, tout propre, Ling a l'air contrariée. L'ancienne vient de lui dire qu'elle ne me connaissait pas assez pour me laisser dormir chez elle, elle a eu un coup de flippe, elle me sent pas si bien que ça ! La tristesse et l'énervement se lit sur le visage de Ling qui me dit : " Let's go ". Hop, je récupère mes bagages et on se retrouve dans la rue. La vieille descend et nous "aide" a appeler un taxi a qui elle donne l'adresse de la mère de Ling. Elle veut sans doute être sure qu'on ne va pas se réfugier dans un hôtel !

Arrivée tardive chez la maman. Elle habite avec un " beau-père ". Ling ne voit d'ailleurs plus son père qui semble ne plus se préoccuper de sa fille. D'un autre cote, son beau-père ne lui adresse pas la parole non plus ! C'est un peu tragique. L'appartement n'est pas immense (45m carre ?) et plutôt vieux, use. La mère se réveille (elle était déjà couchée), me dit bonjour en souriant (je me méfie, maintenant) et discute avec sa fille. Ling me montre sa chambre et me dit de prendre son lit, elle dormira sur le canapé. La mère me dit de me coucher tout de suite, m'escorte dans la chambre de sa fille après avoir refait le lit et ferme la porte derrière moi... a peine le temps de faire un signe a Ling dans l'entrebâillement ! Je suis seul dans la petite chambre. Un lit a baldaquin voile de rosé brode, un sac en forme de nounours pose a cote, encore un napperon rosés qui recouvre le matelas... on dirait la chambre d'une petite fille. Ling m'a toujours donne l'image d'une petite chose fragile, friable, qu'on a envie de protéger. Elle semble vraiment vivre dans son monde imaginaire, loin de la réalité. Son lit sent bon. Je m'endors comme un bébé dans les draps rosés de mon amour platonique de l'empire du milieu.

Vendredi 10 août. Je me leve vers 9h. Fanling manque de sommeil, elle n'a pas pu dormir avant 3h du matin et s'est réveillée aux aurores... la faute au canapé pas confortable, ou a ma présence a proximité ? Je me sens un peu mal a l'aise, du coup. Je lui demande s'il ne vaudrait pas mieux que je dorme dans un hôtel la nuit suivante. Yes, maybe, me répond elle du tac au tac. Merde, ça ça fout un coup au moral, je ne m'y attendais pas. Mais a la fois c'est plus confortable de ne se sentir dépendant de personne, surtout que j'ai du mal a comprendre toutes les reactions de la famille. Et puis je ne m'attend pas a vivre une histoire de quelques jours avec Ling... elle semble toujours attendre l'homme de sa vie et semble loin d'envisager quoi que ce soit en dehors d'un mariage, d'après les discussions que nous avions eu deux ans plus tôt. Je m'en voudrais de créer un cataclysme qui détruirait ses illusions ou nourrirait trop d'espoirs en elle, et je ne me sens etonnament pas prêt a la demander en mariage, si fort

soit l'envoûtement qu'elle crée en moi. M
On sort petit-déjeuner vers 11h, encore des rice noodles, et puis un verre de lait frais (ça faisait longtemps) et un verre de jus de pastèque. On se promené ensuite dans un grand parc renfermant un lac. Les habitants pratiquent le Tal-Shi, la gym, la danse, ou jouent de la musique assis sur des bancs. Les enfants jouent aux auto-tamponneuses dans un mini-parc d'attraction. Tout est propre et neuf, on pourrait sans difficulté se croire dans une capitale regionnale. C'est pourtant une toute petite ville de seulement 300 000 habitants ! Le Lonely ne parle de cette ville que dans un point historique sur le Yunnan en disant qu'elle a été colonisée par les français pendant une courte période, au tout début du XXe siècle. Lorsque j'en parle a Ling, elle me dit qu'effectivement, de nombreuses chinoises ont épouse des français a cette période... hum. Des petits pavillons a la chinoise agrémentent le parc. Au pied de l'un d'eux, on peut louer des pédalos. Bien sur, je lui propose de faire un tour ! Je me retrouve en train de pédaler au fil de l'eau de ce lac urbain. Ling cueille dans les arbres des fleurs rouges (qui sont en fait des fruits sucres et visqueux), on passe sous des ponts en pierre... plus bucolique, ça n'exsite pas. Elle finit par s'endormir en pleine balade (merci Richard). Je la ramené sur la rive, elle ne tient plus debout. Un taxi me pose devant une salle Internet vers 13h, elle part pour une longue sieste " dans son lit".

Vers 16h, toujours pas de nouvelles (on se parle par textos, c'est pratique). Je pars donc me balader dans les rues. Plein de boutiques de fringues, de téléphones surtout. Je me retrouve soudain nez-a-nez avec un temple, celui-là même que j'avais "visite" lors de mon passage éclair dans la ville deux ans plus tôt, quand j'attendais Fanling (qui n'est jamais venu). Je retrouve la salle Internet ou j'avais passe un moment. C'est toujours amusant de faire le lien physique, les deux voyages sont a présent geographiquement relies. Ling finit par se lever et on se retrouve chez elle vers 17h30. Elle se met a me cuisiner plein de petits plats : morceaux de patates epicees, sortes de racines de bambou cuisinées au gingembre, soupe d'oeufs... de la bonne cuisine locale quoi. Et puis elle me propose de passer la soirée au KTV (Karaoké en salle) : bien sur, je roule a 100% ! On me trouve d'abord un hôtel, une chambre très propre, juste pour moi, avec lit double, salle de bains et télé, pour seulement 50 Y...

On arrive dans un grand bâtiment. Une dizaine d'agents d'accueil nous escortent jusqu'à un petit salon avec canapés, table basse, grande télé et console de contrôle. On nous amené des pop-corn, une assiette de fruits et du thé. Derrière la télé, le papier peint montre des femmes a poils se faisant toucher par des créatures imaginaires... si c'est pas un appel, ça. Je suis seul avec Ling. Elle regarde les morceaux disponibles et fait une liste de ce qu'elle veut chanter. Je regarde les titres en anglais, il n'y en a que quelques dizaines, rien qui fasse rêver, loin de la. Ling commence a chanter des chansons pop chinoises. Ça parle probablement d'amour impossible, ça pleure dans les clips. Moi je la regarde chanter en buvant du thé et en me délectant d'une tranche de pastèque. Elle a une voix magnifique, ça me touche, bien sur. Je ne suis pas sur d'avoir déjà vécu un vendredi soir aussi trépidant.

On n'est pas seuls longtemps. Une copine, puis trois copains viennent nous rejoindre. Ils chantent a tour de rôle ou ensemble des chansons, toutes plus incroyables les unes que les autres. De la pop variété comme on n'ose même pas faire en France. Mais ils s'amusent beaucoup, ils sont a fond, super rigolos, j'irai jusqu'à sympas. Ils hurlent dans les micros de manière très enthousiaste, a défaut de chanter juste. Tout le monde réclame un chant de ma part. Je me résigne à choisir "My Heart will go on" de Céline Dion, que je chante en duo avec Fanling sous des tonerres d'applaudissements. Irréel vous dis-je. Je suis un peu Bill Murray comme dans " Lost in Translation ", baigne dans une ambiance que je ne comprends pas très bien mais qui me fait sentir bien, si loin de chez moi.

Taxi. Hôtel. Je suis seul. J'allume la télé. Sur la chaine CCTV5 (la chaine de sports en continu chinoise), je tombe sur le tournoi de Tennis de Montréal ! Comme deux ans plus tôt, je crois que c'était exactement a la même période, ce doit donc être le même tournoi ! L'américain Roddick affronte le tchèque Stepanek en quart-de-flnale. Stepanek gagne en faisant un match prodigieux. S'ensuit Fédérer contre Hewitt... j'essaye de lutter mais finis par sombrer, vers 2h du matin.

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