08 août 2010

Puerto Varas, à la croisée des tranquilles

Samedi 7 août - Castro

Avant d’avancer plus avant, encore une petite anecdote inquiétante vécue à Pucón, omise dans le précédent récit : le dernier soir, alors que nous rentrons à l’auberge, une voiture de la Policia est stationnée juste devant, gyrophares allumés. Deux agents en costume kaki se tiennent droits comme des i dehors, juste à côté de la porte d’entrée extérieure de notre chambre. Ils ne répondent pas à notre salut embarrassé. Quelques minutes passent dans la chambre. Je me risque à jeter un œil à l’accueil : trois personnes inconnues, civiles, qui semblent agacées de ma présence, me disent d’avancer plus loin. Alexis n’est pas là. Le feu est presque éteint, il fait sombre. L’un des hommes ouvre les placards de la pièce et scrute les étagères avec une lampe de poche. Je m’enfui à nouveau jusqu’à la chambre, sous l’œil torve du policier, dehors. J’y retourne 15 minutes plus tard : la voiture n’est plus là, ni les trois inconnus, et Alexis, derrière son comptoir, arbore son plus beau sourire de surfeur. Je lui demande ce qui s’est passé : « nada, nada ! », souriant. Je n’y avais plus repensé depuis, mais ça ne vous parait pas étrange, à vous ?

Mais revenons à nos moutons, plus au sud, du côté de la jolie Puerto Varas…


Jeudi 5 août

Puerto Varas. Dès notre arrivé, on est frappé par les nombreuses maisonnettes (d’architecture allemande, on l’apprendra par la suite) dont les façades joliment peintes sont constituées de multiples petites lattes de bois juxtaposées (un peu comme des tuiles), avec des toits en ardoise bien typiques. On se croirait un peu en Finlande. Les quelques rues qui constituent le centre ville sont agglutinées à proximité d’une grande baie portuaire, porte d’entrée de l’immense lac Llanquihue dont on ne distingue que les contours les plus proches avant de les perdre dans la brume. Une atmosphère de quiétude se dégage de ce qui semble être un sympathique village de pêcheurs, et on y ressent une forme d’authenticité qui faisait un peu défaut à Pucón. Le temps, lui, est plutôt au gris.

A la casa Margouya, petite auberge bien bab’ au 1er étage d’un bâtiment jouxtant le lac, Marie nous accueille chaleureusement. C’est une jeune française sympa qui gère le lieu avec son copain chilien Richie, pendant que Nico, l’ardéchois à l’origine du truc, s’occupe d’un pub à bières qu’il a ouvert la rue d’à côté. Pas cher et roots, avec une super petite cuisine équipée et une pièce centrale super agréable avec des tentures multicolores, une table, de la musique, un chien qui dort sur un fauteuil. Quand on explique à Marie qu’on compte descendre jusqu’à la terre de feu, elle fait une espèce de grimace que j’ai déjà vu… sur tous les visages des gens à qui on a parlé de notre itinéraire ! Rassurant.

Petite promenade sur une petite colline boisée dominant la ville et le lac. L’activité accrobranche y est possible… l’été. Des zizis de taille clairement exagérés sont griffonnés à la hâte sur des panneaux de signalétique en bois. Ça, c’est comme le Coca Cola, yen a vraiment partout, signature universelle d’une race humaine masculine définitivement portée sur son attribut de naissance. La redescente vers le centre nous permet de croiser encore de nombreuses maisons top classes, dont les toits sont irisés par une belle éclaircie.

Petite soirée cool à l’auberge, de lecture, de discussions, d’Internet et de quelques fruits.


Vendredi 6 août

Il a plu toute la nuit, mais le ciel semble un peu plus clément ce matin là. On se prépare un festin au petit déj à base de victuailles achetées la veille dans un supermarché : salade de fruits frais, yaourts, café, œufs brouillés au fromage, jus d’orange pressé… avant de se diriger vers la rue d’où partent les micro-bus en vers les alentours. Direction les fameux Saltos de Petrohue, sur une rivière idéale pour faire du rafting… l’été. Le spot, à 1h30 de route, vaut vraiment le coup d’œil : de magnifiques cascades coulant puissamment le long d’étroites gorges et se déversant dans des cuvettes d’eau bleu turquoise. On peut admirer ce paysage spectaculaire depuis des petites passerelles construites juste au dessus. Et on ne s’en prive pas.

On reprend un bus jusqu’au départ du sentier « le solitario » sensé courir sur 6 km en contrebas du volcan Osorno, et traversant différents types de paysages. On commence par 2 km environ de forêt, le chemin monte un peu mais pas trop, plutôt agréable. Et soudain on se retrouve à l’air libre, plus de sentier, plus rien. De larges travées de sable noir et de roches volcaniques sillonnent un paysage aride essentiellement composé de grosses pierres recouvertes de mousse vert clair. On se décide à suivre une travée noire qui semble grimper vers le volcan… jusqu’à ce qu’elle rejoigne une autre travée et que le paysage nous semble suffisamment hostile et sujet à se perdre pour rebrousser chemin, en suivant nos traces de pas dans le terrain sablonneux noir pour être sûr de retrouver le sentier en sens inverse !

Dans le bus retour pour Puerto Varas, il se met à pleuvoir dru dehors. Abba se met à résonner dans les enceintes du véhicule. L’averse passe, un rayon de soleil irise le lac et un arc-en ciel apparait. Comme par hasard. Merci Abba.

En ville, on essaye de voir les possibilités dans le coin et de prévoir la suite. Plein de trucs à faire, mais la météo des jours à venir ne semble pas s‘y prêter, on décide donc de partir passer quelques jours sur l’île de Chiloé (un peu au sud, sur l’océan pacifique) avant de revenir dans le coin profiter des lacs et des sommets volcaniques, dont on n’a pu pour l’instant que deviner la présence derrière un épais plafond nuageux.

Tous les chiliens que nous rencontrons ici, de l’office de tourisme aux agences de voyages en passant par les serveurs de cafés et les passants, passent beaucoup de temps à nous aider avec une gentillesse rare, essayant de répondre à chaque question avec précision, nous écrivant toutes les infos sur des feuilles de papier, nous recommandant des amis à contacter à différents endroit. Dans la rue, les voitures s’arrêtent pour nous laisser passer aux clous et les conducteurs nous font un signe de la main avec un grand sourire. Dans les bus, tout le monde se salue chaleureusement et les chauffeurs font des crochets de plusieurs centaines de mètres dans des petites rues en terre pour déposer des usagers juste devant chez eux. N’importe qui peut monter et descendre n’importe quand. La vie s’écoule paisiblement ici, et on sent une belle humanité, des gens qui prennent soin les uns des autres. Une jolie leçon de vie. Seul étrangeté, commune avec les boliviens : ils mangent tous des glaces à longueur de journée, en plein hiver. Pourquoi pas.

A la casa Margouya, Marie et Richie ont la belle vie (pardon, pas pu m’empêcher... ah non merde c'était Ricky). Ils se préparent du bon boudin poêlé dont le fumet nous donne l’eau à la bouche. On mange finalement des filets de saumon trop cuits baignant dans une sauce trop grasse à base de crème, d’huile et de fromage ! On finit par une bonne bière artisanale au Tronkos, le pub de Nico l’Ardéchois, chevelu, barbu, LE gars cool des magazines, qui a tout lâché il y a 10 ans pour venir accueillir le monde dans ce havre de paix et lui faire goûter sa bière. Une bière exceptionnelle par ailleurs, à la belle amertume teintée de miel. On rentre dans une auberge vide, tout le monde est sorti faire la fête (il faut dire qu’on est les seuls hôtes du moment !). On se sent un peu comme chez nous ici.


Samedi 7 août

Le bus pour Chiloé part à 9h15 de l’autre bout de la ville, on est à l’heure. Il fait assez beau, mais des nuages menacent encore. Le temps est très changeant dans cette région des lacs. Le bus s’enfonce vite dans une brume compacte, avant de ressurgir en plein soleil puis de se prendre une nouvelle radée ! Les merveilles de la technologie nous permettent d’écouter sur l’iPod le dernier album d’Arcade Fire, "The Suburbs", sorti il y a à peine quelques jours. Un ferry fait traverser au bus le détroit pour atteindre l’île de Chiloé. Le paysage y est assez magique, beaucoup de plus petites îles accrochées, de brume, d’où surgissent de petites maisons espacées et quelques troupeaux. On se laisse bercer par "Harrowdown Hill" de Thom Yorke ou "Weeping Willow" de Sebastien Schuller, qui collent parfaitement avec le paysage.

Samedi 7 août - Entre Puerto Varas et Castro (île de Chiloé)

1 commentaire:

B. Cariou a dit…

le feuilleton de l'été ! bises à vous 2 (et faites gaffe à vos papiers ;)