Vendredi 28 août – La Paz
Ca y est, ça sent la fin. Dernier soir à La Paz avant le grand retour. Les fins de voyage c’est toujours particulier, on se demande comment on va gérer le changement d’ambiance, la fin de la bulle. J’ai une grosse pensée pour le Woodstower, dont le 1er soir est déjà terminé… je croise les doigts. Les photos continuent à fleurir sur Facebook, ici et ici. Mais allez, avant de parler de retour, allons plutôt faire un tour du côté amazonien, suivre les quelques jours passés avec les animaux de la pampa…
Dimanche 23 août
Direction l’aéroport de la TAM (Transporte Aereo Militar, aéroport militaire), qui n’est pas le même que l’aéroport international, bien que les deux mutualisent leurs pistes. Un micro nous monte jusqu’à El Alto, l’autre nous dépose devant un petit portail gardé par un militaire. Un petit écriteau TAM nous prouve qu’on est au bon endroit. Le soldat nous ouvre la porte et nous dit d’aller tout droit. Il n’y a qu’un petit bâtiment un peu délabré au bout du petit chemin. Et personne ! Si, deux australiennes attendent dehors en lisant. Notre avion est sensé décollé dans 1h20. A l’intérieur du bâtiment, pas un chat. Pas de lumière. Le petit magasin est fermé, ainsi que le petit resto. Il y a juste une salle d’attente octogonale plongée dans l’obscurité, et puis des ouvertures vers la piste, sans aucun contrôle pour y accéder. Deux petits avions sont à l’arrêt. C’est un aéroport fantôme ! Flippant. L’heure qui suit amène son lot de passagers, une quinzaine, qui ne semble pas stressé. Une des australiennes trouve l’interrupteur pour allumer la lumière… les néons font tellement de bruit qu’on finit par les éteindre à nouveau. Une jeune fille se pointe vers la « zone d’embarquement » et pèse nos bagages avec une grosse balance à aiguille. On à l’impression que l’aéroport est tenu par une famille, un peu comme les auberges ! Les mochillas sont entassées dans un coin, on peut rejoindre la « salle d’embarquement », un petit SAS. Nos bagages à main ne sont pas fouillés, mais des panneaux nous informent quand même qu’il est interdit de transporter des flingues, des couteaux ou autres tronçonneuses. Ah bon, ok.
L’avion n’est pas si petit, il a une petite cinquantaine de sièges, du coup il fait bien vide. Un sandwich nous est distribué à l’entrée. Le vent souffle en fortes rafales sur l’altiplano, ça n’est pas rassurant. Mais on y est. Le décollage se passe… bien. Et puis le spectacle du paysage efface peu à peu le stress dû au non professionnalisme affiché de la compagnie. Les hauts plateaux secs laissent rapidement la place à de hauts sommets enneigés, qu’on a l’impression de toucher tant on vole prêt, l’avion gardant une altitude assez basse. Et puis les montagnes redescendent et une étendue verte sans fin prend le pas, sillonnée de larges cours d’eau saumâtres : la forêt amazonienne ! C’est incroyable comme tout a changé vite. Une petite barrière de montagnes, et l’univers s’est transformé. L’avion descend déjà. On aperçoit de mieux en mieux les grands arbres d’une densité impressionnante, et puis les nombreuses rivières. L’atterrissage se fait sur… de l’herbe !!! Une courte piste totalement recouverte de gazon. En sortant de l’habitacle, on se rend compte que les avions décollent et atterrissent sur une fine bande de terre centrale… et surtout qu’il fait chaud et humide ! On est en pantalon, polaire, pull, grosses chaussures, et on étouffe. On se change aussi vite que possible. L’aéroport est encore plus petit que celui de la TAM, plus proche d’une cabane qu’autre chose. On attend nos bagages dehors, à côté d’un petit portail donnant sur la piste d’herbe. Et puis une jeep nous transporte jusqu’au centre ville de Rurrenabbaque, plus communément appelée « Rurre ». La route est tantôt de terre, tantôt pavée de petit cailloux. On traverse un paysage peuplé de palmiers, arbres et plantes en tous genres. J’ai l’impression d’être de retour en Asie, dans les paysages de Birmanie ou du Laos. Plus du tout en Bolivie.
La ville a des allures de village amazonien tranquille, très verte, plutôt vivante, parcourue essentiellement de deux roues. On trouve une guest-house un peu à l’écart du centre, « El Curichal », tenue par un père et son fils, aux petits soins tous les deux. Les chambres donnent sur une petite cours intérieure dont tous les murs sont peints des couleurs de la jungle avec des animaux, et une dizaine de hamacs sont installé sous un manège de bois central. On est bien, on est ailleurs.
Il nous faut maintenant décider ce qu’on va faire de nos quelques jours ici, et rentrer dans la guerre des agences ! Il y a deux types de tours ici : dans la pampa, avec la certitude de rencontrer plein d’animaux sauvages, et dans la jungle, plus axée sur l’expérience de se promener, de dormir, de se familiariser à un environnement inconnu et fascinant. On hésite, on voudrait tout faire. On va voir plusieurs agences, les prix sont à peu près les mêmes, mais faire la pampa ET la jungle semble compliqué. Un couple d’anglais bien sympa rencontré à l’hôtel (Iain, originaire de Gibraltar, et Yohanna) part pour 3 jours de pampa avec « Dolphin Travel ». On décide de faire de même, on verra bien si on peut aller se balader dans la jungle le dernier jour. Nos sésames en main, on va manger des gros poissons frais du fleuve au piranha café (sauces roquefort et niçoise). Délicieux. Du coup on fait un peu pote avec le cuistot, un français pied-noir venu s’installer ici. Pendant notre retour à pied à l’hostal, un motard tente de me chopper ma sacoche à la volée, ou de me toucher le cul en me prenant pour une fille, on ne saura jamais. En tout cas il n’arrive à rien. Les chambres sont équipées d’un ventilateur, pour notre plus grand bien. On s’endort assez vite.
Lundi 24 août - Pampa / Dia 1
On prend le temps de se réveiller peinard, le départ n’est qu’à 9h. Il a plu toute la nuit, des grosses averses dont la violence nous a régulièrement réveillés. Il fait un peu plus frais du coup. On a tout ce qu’il faut avec nous : écran total et après soleil, anti-moustiques, sandales (achetées au marché la veille), maillot de bain (toujours pas Alice). On laisse les mochillas à l’hostal et on va petit déjeuner dans une échoppe de la « rue des agences » (elles sont toutes concentrées). On rencontre nos camarades de jeu de la pampa : Iain (30 ans, barbu cool) et Yohanna (24 ans, brune mimi), rencontrés à l’hôtel, Christina (dreadeuse blonde) et Diego (rasé et sec), un peu moins de 25 ans chacun, suisses allemands, et enfin les deux australiennes de l’avion, 22 et 27 ans, prénoms oubliés. On part en 4x4 pour un trajet de 3 bonnes heures sur une route pourrie (suffisamment pour devoir changer une roue à mi-parcours), jusqu’à Santa Rosa, porte d’entrée au parc protégé s’étendant de part et d’autre du fleuve Yacuma. Pendant le trajet, la pluie reprend, puis redouble d’intensité, et le terrain devient complètement boueux et difficile à pratiquer. Avec nous un chauffeur et Nico, le cuisinier fort sympathique qui nous suivra pendant trois jours. A notre arrivée à Santa Rosa, on nous donne à chacun un joli petit livret répertoriant tous les animaux susceptibles d’être croisés dans le coin avec photos, descriptifs et mode de vie (Alice porte un intérêt tout particulier au paresseux, dormant 22h sur 24h), et puis on se pose dans une sorte de cantoche en bois pour déjeuner un almuerzo local bien typique à base de soupe, de viande et de légumes.
On arrive au point de départ des embarcations (de longues barques en bois à moteur), sur les bords du rio Yacuma. Les groupes des différentes agences se préparent, entreposent leurs sacs et les containers de nourriture en queue de bateau, et partent le long du fleuve, les uns après les autres, à quelques minutes d’intervalle. C’est bientôt notre tour. Les australiennes ont rejoint une autre embarcation, on se retrouve à 6, ainsi que Nico le cuistot et Wilfredo le guide, qui nous a rejoint. Une bonne quarantaine d’années, l’air plutôt sympa au premier coup d’œil. La pluie a globalement cessé mais quelques gouttes tombent par ci par là, et le ciel est encore très couvert et venteux. Je n’avais pas prévu ça, et j’ai vite froid en t-shirt, short et sandale avec le courant d’air créé par la vitesse de la barque.
A part ça, les 3h de bateau amènent leur lot d’émerveillements. On commence par apercevoir de nombreux caïmans (tout noirs) et alligators (jaunes à bandes noires), posés comme des étrons sur la rive ou laissant leurs yeux dépasser de l’eau. Et puis des familles de capibaras (hidrochoerus hydrochaeris), mélanges informes entre sanglier (corps) et castors (tête). On s’arrête devant un arbre ou on entend des singes. Et soudain plein de petits singes genre ouistiti un peu jaunes et super mignons se pointent pour nous mater. L’un saute même dans la barque, la sillonne, monte sur les épaules de Diego et repart à la recherche de bouffe dans les sacs plastique. Un peu plus loin, un dauphin rose saute juste à côté du bateau. Des tas de dauphins de cette sorte vivent le long de ce cours d’eau. Les dauphins amazoniens ont été enfermés dans ces cours d’eau suite à des mouvements tectoniques, et ont subi des mutations génétiques pour pouvoir vivre dans ce nouvel environnement d’eau douce, loin de la mer. Leurs yeux sont devenus minuscules, adaptés à la vision en eau trouble, leur sonar s’est encore développé et leur aileron, très peu utilisé, s’est presque entièrement résorbé. On croise encore des grosses tortues d’eau posées sur des branches ou laissant dépasser leur tête de l’eau, et bien sûr une variété impressionnante d’oiseaux. Hérons, cigognes, différents rapaces qui s’envolent le long de l’eau à notre approche et rejoignent des branches d’arbres un peu plus en hauteur. Certains sont en train de pêcher dans l’eau. Et puis régulièrement, des poissons sautent à côté de nous. De part et d’autre du fleuve, des arbres touffus aux lianes tombant dans l’eau, d’autres dont il ne reste que les branches, avec parfois des gros nids autour des cimes, et puis quelques grosses fleurs, souvent roses, par ci par là.
On débarque vers 17h dans une « Ecolodge » toute en bois, construite sur pilotis, le long de la rive. On occupe une chambre à 8 lits, tous dotés de moustiquaires. D’autres groupes occupent d’autres chambres adjacentes. Des hamacs sont installés avec vue sur des arbres remplis de singes qui sautent de branche en branche. Un peu plus loin, en suivant un pont de bois, on arrive à un mirador ou tous les groupes viennent se poser pour admirer le coucher de soleil. On partage une bouteille de vin pour profiter du spectacle, le soleil de plus en plus rouge qui se laisse progressivement engloutir par la savane, au-delà du fleuve. En dessous, 4 ou 5 hommes jouent des tubes du folklore bolivien à l’aide de guitares, tambourins et flûtes, égayant une ambiance déjà bien chaleureuse. Le repas qui suit est un festin, Nico nous sert au moins 6 plats différents, salades diverses, petits légumes bien préparés, poulet en sauce et autres mets. On profite un peu du calme et des bruits des arbres et des animaux alentours avant d’aller se coucher. Dehors, les nuages se sont totalement dissipés et ont laissé la place à une pluie d’étoiles.
Mardi 25 août - Pampa / Dia 2
Le petit déjeuner commence à 7h. Différents beignets au fromage, pains, œufs au plat, crêpes… Nico s’este encore défoncé. Dehors le soleil a repris les rennes, mais des nuages continuent à voiler partiellement les cieux. L’ambiance est assez cordiale entre nous, mais ne vaut pas la virée du sud-ouest. Et le guide est plus distant qu’Edgar, ne mange pas avec nous, ne nous parle que pour nous détailler la suite des événements. On part à 8h pour la première activité de la journée : la recherche d’anacondas dans la savane !
L’embarcation ne nous sert qu’à traverser le cours d’eau, et on part à pied sur les terres de l’autre côté. Ca y est, on est vraiment dans la pampa. On traverse des terrains assez pauvres en végétations, des champs de fougères ne laissant dépasser que nos têtes, et puis des marécages encore gorgés de l’eau tombée la veille, plein de boue et de vase puante. Heureusement on s’est tous fait prêter des bottes. Ca ne nous empêche pas de nous enliser régulièrement et d’avoir du mal à lever une jambe engluée, surtout Alice qui a pris des bottes un peu trop grandes et qui manque à plusieurs reprises d’en laisser une dans la boue en laissant sortir son seul pied ! On se retrouve à côté d’un petit cours d’eau, et les recherches des gros serpents s’intensifient. Wilfredo se sert d’un bâton (au bout se séparant en deux, comme une langue de serpent) pour ratisser le fond de l’eau. On change d’endroit régulièrement, de cours d’eau en marécages herbeux, mais nos recherches restent vaines. Des nuages cachent le soleil. Wilfredo nous explique qu’il n’a pas plu les deux derniers mois, que le temps de la veille était absolument exceptionnel, et que les anacondas se cachent en l’absence de soleil. C’est con. On continue quand même à chercher. Iain est à deux doigts de tomber dans le marais, il se stabilise avec un bras qu’il plonge dans l’eau sans avoir à mouiller le reste. Yohanna, par contre, vacille complètement et tombe le cul dans l’eau boueuse. Ca c’est fait. Un peu plus loin, sur le chemin du retour, on aperçoit un autre groupe qui a lui trouvé un anaconda ! On le rejoint et on observe la bête. Environ 2m, pas le plus grand spécimen de son espèce (certains peuvent atteindre 9m !), mais quand même impressionnant. On le fait sortir de son talus, on le touche (tout doux), Diego le brandit en l’air.
Un peu plus loin, le terrain est presque dépourvu de végétation à part de l’herbe. Wilfredo nous explique que des vieux du coin brûlent régulièrement la pampa sur des lieues à la ronde pour que leurs troupeaux de vaches puisse brouter peinard. Ils sont maintenant interdits de le faire, mais ne comptent pas s’arrêter pour autant. Ils sont fous ces vieux de la pampa. Et effectivement, des vaches broutent au loin, côtoyées par quelques chevaux. Globalement Wilfredo parle beaucoup dans sa barbe, aux personnes les plus proches de lui, et n’a définitivement pas l’enthousiasme communicatif d’un Edgar. Mais il nous éclaire quand même sur certains trucs, c’est déjà ça. On rentre vers 11h30 au camp de base pour bouffer. Nico a encore pété les plombs en nombre de plats. La matinée a quand même été fatigante et on se jette dessus comme des affamés.
Après un petit repos à lire dans les hamacs et à jouer avec les singes, on repart en barque vers 14h. Objectif : aller nager avec les dauphins roses ! Wilfredo stoppe l’embarcation au milieu d’une sorte de cuvette élargissant le fleuve, où on a vu de nombreux dauphins la veille. On est d’abord trois à se baigner : Iain (prononcer « Yen »), Yohanna et moi-même, avant d’être rejoint plus tard par Christina et Diego. Il faut dire que se baigner dans des eaux totalement marron de boue et dans lesquels nagent piranhas et caïmans n’a rien de très excitant au premier abord !
Plusieurs reptiles nous regardent de la rive. A un endroit, mes pieds touchent quelque chose de visqueux et je hurle : c’est en fait seulement le fond, recouvert d’une couche gluante de dépôts divers. Et puis il y a les dauphins, qui apparaissent à intervalle varié, sautant et replongeant dans l’eau, pas très loin de nous. Il y en a beaucoup moins que la veille, mais il y en a. Wilfredo nous dit qu’aucun animal n’attaque les baigneurs tant qu’ils sont entourés de dauphins. Merci les gars.
Le soleil est maintenant seul dans un ciel totalement découvert, il fait chaud et on sèche rapidement. On revient un peu sur nos pas pour prendre un bras du fleuve et s’y arrêter. C’est l’heure de la pêche aux piranhas ! Wilfredo nous montre comment pêcher au fil, en accrochant des morceaux de viande crue au bout d’un hameçon et en tirant fort et au bon moment. Le truc est flippant : à peine les morceaux de viande immergés dans l’eau, ils se font immédiatement engloutir par ces poissons carnivores. Je repense au fait que j’étais moi aussi dans l’eau, à quelques dizaines de mètres de là. Gloups. Après un peu d’entraînement je m’avère être un pêcheur pas complètement naze. Mais je n’attrape presque que des petits piranhas, les jaunes. J’ai pitié, trop petits, je les rejette à l’eau. Je pêche plusieurs petites sardines aussi. Me semblant qu’elles n’ont pas encore embrassé leur destin, je leur rends aussi leur liberté. En fait je me sens incapable de tuer un poisson, c’est nul. Finalement je choppe un piranha jaune. Je prends mon courage à deux mains pour l’assommer contre le rebord du bateau. Il bouge encore. Je m’y reprends à dix fois, et j’ai toujours l’impression que le poisson est en vie. Je le tambourine encore plusieurs fois de toutes mes forces. Là je crois qu’il a son compte, mais je suis tremblant. Wilfredo me dit très justement : « si tu ne veux pas tuer les poissons, il ne faut pas pêcher ». Je m’en souviendrai. On a finalement 4 piranhas pour le dîner, un jaune (le mien) et trois rouges (pêchés par Wilfredo et Diego). Alice en a eu marre au bout de quelques minutes après avoir fait choux blanc, mais je lui soupçonne un peu moins de manières que moi si elle avait eu à tuer une de ces pauvres bestioles carnivores.
On est de retour vers 17h30. Encore un temps de repos. Les petits singes du coin sont maintenant nos potes. Alice veut absolument en ramener un, je prie pour qu’elle n’y arrive pas, tout en lui disant le contraire bien sûr. Le coucher de soleil est encore un grand moment. Les musiciens, couchés dans des hamacs, jouent et chantent une version espagnole d’ « Imagine » de John Lennon, alors qu’une bonne bière fraîche coule dans nos gosiers et que le soleil rouge embrase la Pampa.
Le dîner est exagéré, les plats sont innombrables et délicieux, pour tous les goûts. Les piranhas grillés arrivent en dernier, comme un trophée. Et puis Nico a fait un gâteau, c’est l’anniversaire de Taby, l’une des australiennes, qui a 27 ans aujourd’hui. Les gars de l’agence ont capté le truc sur la fiche d’inscription et lui ont préparé une surprise. Sympa. La discussion tourne voyage, itinéraires des uns et des autres, anecdotes loufoques et plus grandes incompréhensions sur la route.
Vers 20h, il fait nuit noire. Wilfredo nous propose de faire un dernier tour sur le fleuve pour observer la luminosité des yeux de caïmans dans la nuit. Ok ! On n’allume pas le moteur, on se laisse glisser par le courant en écoutant les bruits de la pampa et en éclairant les rebords à l’aide de nos lampes de poche. Les yeux des caïmans et des alligators réfléchissent la lumière de nos torches en de petits scintillements rouges. On en dénombre une centaine, qui se reflètent parfois eux même dans l’eau. La balade est vraiment reposante, et on a l’impression de découvrir une autre facette du fleuve. Le retour, contre courant, se fait avec le moteur, et on revoit tous les yeux rouges filer à toute allure à droite comme à gauche. De retour, on ne fait pas long feu avant de s’éteindre.
Mercredi 26 août - Pampa / Dia 3
J’ai très mal dormi, fais d’affreux cauchemars. Mes enfants (?) étaient devenus méconnaissables, avaient vendu leur âme au diable ou quelque chose comme ça. Je les regardais dans les yeux sans les reconnaitre, et ça m’emplissais d’une peur infinie. Réveillé en pleine nuit, remplie de tous les bruits étranges de la nuit, je n’ai même pas eu le courage d’aller aux toilettes. Le réveil à 7h m’apparait presque comme une délivrance.
Après un dernier petit déjeuner ultra copieux, on embarque une fois encore sur le fleuve. Cette fois, on va plus loin qu’on n’est jamais allé, à une allure pourtant très cool, et on prend le temps d’admirer le paysage et la faune, en perpétuelle évolution. On retrouve un tas d’animaux déjà aperçus, mais d’autres encore. En regardant bien dans les arbres, on aperçoit des perroquets aux couleurs rouges vives, qui nous racontent on ne sait quoi (surement des conneries), et puis des petits colibris (enfin on croit). Le soleil est au rendez-vous aujourd’hui, et les tortues sont toutes de sortie, les unes sur les autres (dans des positions très moyennement catholiques), par dizaines à chaque fois. Certaines d’entre elles plongent dans l’eau en nous voyant arriver, alors que les autres nous lancent des regards d’un vide absolu. Des aigles tournoient au dessus de nous, se posant parfois dans les branches d’un arbre. A un endroit du fleuve, sans doute plus profond, on se retrouve littéralement entouré de dauphins roses, qui ne cessent de sauter autour du bateau. On a vraiment l’impression d’être dans un autre pays avec Alice, dans un autre voyage. Il y a quelques jours à peine on se caillait sur des volcans à 5000m d’altitude, et là on est dans la jungle amazonienne avec des dauphins et on crève de chaud. Hallucinant. On a du mal a se dire que le voyage touche à sa fin aussi, et on profite de tous ces instants au maximum, conscients qu’ils sont précieux et qu’ils resteront.
De retour à 10h30 au camp de base, on fait nos sacs pour le départ et… on mange à 10h45 ! C’est de la folie, je n’ai jamais mangé autant. Je crois que pour la première fois en voyage je risque de rentrer avec quelques kilos en plus ! C’était pas vraiment le but, mais la nourriture est tellement bonne ici qu’il est difficile de dire non. Wilfredo est de plus en plus antipathique avec le temps, se fout un peu de notre gueule ouvertement, nous engueule si quelqu’un n’a pas entendu une consigne qu’il a dit en murmurant avec le moteur allumé… personne dans le groupe n’est très fan. Nico par contre (le cuistot) a bien mérité un pourboire !
A midi, on est sur le bateau pour le chemin retour jusqu’à Santa Rosa. Dans le sens du courant, on ne met qu’une heure et quart pour faire le trajet, en plein cagnard. Moi, comme un con, j’ai fait péter le t-shirt et n’ai pas jugé opportun de m’enduire de crème… je m’en mordrai les doigts le soir même. On repart en jeep vers 14h, pour 3 bonnes heures de route de Santa Rosa à Rurre. Toujours aussi pourrie, la route a toutefois séchée. Ca ne nous empêche pas de crever une fois de plus. La routine quoi. A 30 minutes de l’arrivée, Christina se rend soudain compte qu’elle a oublié sa sacoche avec tous ses papiers et son pognon lors de la pause précédente, à 30 minutes de route également. On insiste tous pour y retourner, mais Wilfredo et le chauffeur nous font comprendre qu’ils n’ont pas que ça à faire, qu’il faut faire attention à ses affaires. Pas cool. Du coup je prête 300 Bs à Diego, qui parvient à stopper un motard acceptant de faire l’aller-retour avec lui. J’ai l’impression d’avoir eu tellement de galères de ce genre dans ma vie que la vivre comme simple observateur me semble presque irréel. Si je pousse un peu, avec le recul de ce jour où j’écris ces lignes, j’ai presque un début de pointe de jalousie ! Mais mieux vaut ne pas pousser ;-)
Retour à Rurre. La meuf présente dans le bureau de l’agence n’a pas la clé permettant d’ouvrir le tiroir dans lequel on a laissé nos passeports, on devra repasser. Retour au Curichal, le vieux est définitivement cool. Bonne douche et repos. On voit un papillon géant. Christina me rend l’argent prêté, tout roule. On retourne à « Dolphin Travel » vers 19h, nos passeports nous sont rendus. On voit avec elle s’il est possible d’aller faire un tour dans la jungle le lendemain matin, histoire de profiter jusqu’au bout, et vu que notre vol est à 16h20. Elle nous dit que oui, on organise tout, et puis soudain elle se rappelle qu’elle a entendu que le vol de la TAM serait annulé le lendemain. Elle passe un coup de fil et confirme : on ne pourra rentrer par ce vol. On avait prévu une légère marge pour être sûr d’être à La Paz à temps et pour y faire des emplettes, mais c’est quand même préoccupant. Elle nous dit qu’on peut se faire rembourser en cas d’annulation, et qu’on peut prendre un vol d’une autre compagnie, AmasZonas. Elle passe encore des coups de fil, il reste bien de la place pour le lendemain, à 13h. On annule la jungle, ça va faire short. Elle nous dit de revenir la voir vers 8h, à l’heure d’ouverture des agences, pour nous aider à gérer tout ça. Super gentille la madame. Pas comme la majorité des habitants de la ville, qui répondent à peine à nos questions et qu’on a l’impression d’emmerder au plus haut point, beaucoup moins tranquilles que dans les hauteurs de l’altiplano.
Remis de ces changements de dernière minute, on va manger une bonne pizza (de la bouffe de gringo) au « Monkey bar ». Ambiance feutrée, bougies et Smashing Pumpkins (décidément). L’appel du lit prend le pas sur les autres options qui s’offrent à nous. J’ai des coups de soleil partout, ça brûle.
Jeudi 27 août
On se lève pour filer à « Dolphins Travel » et régler définitivement nos histoires de vols. La madame nous accompagne au bureau de la TAM. Ca ouvre juste, personne n’est compétent, le gars regarde nos billets et nous dit d’aller au bureau central de La Paz pour procéder au remboursement. Bon. Le bureau d’AmasZonas est plus spacieux, plus pro, presque tout le monde passe par cette compagnie. La meuf nous dit qu’il n’y a plus de place pour 13h, mais qu’il y en a pour… 9h30, décollage dans 1h20 ! On commence par dire ok, avant de se rappeler qu’on a du linge à la laverie, qui ne sera prêt qu’à 11h ! On hésite à prendre un vol le lendemain matin, et puis finalement il reste 2 places dans celui de 11h30, ça nous laisse plus de temps, on accepte de suite. Les billets en poche, on court à la laverie en demandant s’ils peuvent se dépêcher, ils nous répondent que tout sera prêt pour 9h30. Parfait. Pffff, que de rebondissements, on a bien mérité un bon petit déj dans un établissement à la cool.
On rentre à l’hôtel chercher nos affaires, dire au revoir à la petite famille, on va chercher notre linge tout propre, et nous voilà à l’heure pour prendre le bus en direction de l’aéroport. Le vol n’est pas à l’heure, lui, et on attend un bon moment que l’avion atterrisse et que les voyageurs sortent pour pouvoir y rentrer à notre tour. Il n’y a qu’un avion qui fait 5 allers-retours par jour entre Rurre et La Paz ! La gestion à l’aéroport est au moins aussi roots qu’à La Paz, pesée à un endroit, retrait des cartes d’embarquement ailleurs, règlement d’une taxe d’aéroports « spécial touristes » à un troisième guichet. On nous appelle dehors pour rejoindre l’avion sans passer par la porte d’embarquement (ils doivent avoir perdu la clé du cadenas).
L’avion est minuscule, beaucoup plus petit que celui de la TAM. 19 places passagers seulement ! Je n’ai jamais pris un avion « de ligne » aussi rikiki. La porte menant au cockpit n’est pas fermée. L’avion décolle après une accélération très rapide sur la courte piste herbeuse. Ca fait quand même peur. D’en haut le spectacle du paysage est toujours aussi beau, mais les secousses se font beaucoup plus sentir, surtout arrivé en fin de parcours, l’avion étant en proie aux bourrasques de l’altiplano. L’arrivée est assez remuante, ça secoue dans tous les sens, on est content d’avoir atterri. A côté de nous, un gars est totalement en nage, dégouline de ce qu’on pense avoir été une grosse frayeur. On récupère nos affaires et on fonce dans un micro à destination du centre ville.
Juste avant d’arriver place San Fransisco, Alice aperçoit Marc sur le trottoir, notre pote montagnard du sud-ouest qu’on avait laissé prêt de la frontière chilienne ! On sort du véhicule et on court dans sa direction, mais en vain, il a déjà été absorbé par la foule se pressant dans les rues aux allures de marché. On retourne donc à notre QG de La Paz, l’hostal Sagarnaga. Les gars nous reconnaissent et nous parlent en français. On se sent un peu chez nous ici. On va se manger un petit en-cas et d’obligatoires « platano con leche » au Pepe’s bar. De retour à l’hôtel, Alice sombre dans une bonne sieste pendant que je profite du Wi-Fi dans la chambre (yeah !) pour regarder mes mails en retard, y répondre, me rencarder sur les actualités françaises, internationales et musicales, uploader de nouvelles photos sur Facebook… glander sur la toile, comme ça ne m’ai pas arrivé depuis longtemps.
Je finis par aller au bureau de la TAM pour le remboursement des billets. Je poireaute super longtemps avant qu’un gars s’occupe de moi et me dise qu’il ne peut rien faire sans Alice, on doit être tous les deux présents. Ok, on verra ça demain. Au réveil d’Alice, on va dîner dans notre resto préféré « The Colonial Pot », on a nos petites habitudes ici. Elle commande un hachis Parmentier pendant que je me régale d’un filet de lama, rosé, absolument délicieux, accompagné d’une sauce aux champignons, d’une bonne purée maison et d’un peu de riz. Le riz, c’est parce que mes intestins ont fini par succomber (au moins en partie) à la bouffe locale. Et Alice n’est pas au top non plu. Mais bon, on a quand même bien tenu, hein. On va se coucher totalement repus.
Vendredi 28 août
On se lève vers 8h après une bonne nuit de sommeil. Après un bon petit déj au Pepe’s bar, direction le bureau de la TAM (on va y arriver). Le gars de la veille nous fait encore patienter devant une télé qui diffuse des clips géniaux. On voit enfin le clip du tube de l’été d’Amérique du Sud, qu’on a entendu partout, aussi bien au Pérou qu’en Bolivie, et qui fait un truc comme « One, two, three, four, un, dos, tres, quatro, RUMBA ». Une tuerie qui laisse des traces dans la tête. Le clip montre plein de meufs à moitié nues remuant leur cul, évidement. On apprend que le chanteur s’appelle « Pitbull ». Classe. Dans un autre style, « Fey », mélange de Lorie et de Kylie Minogue, elle est aussi tout à fait recommandable. Quand il a finit de remplir des tas de paperasses, le type nous en fait signer plein aussi, et nous assure que l’argent sera directement reversé sur le compte d’Alice. Ca, c’est fait.
On retourne faire un tour en ville, bien décidés à acheter quelques souvenirs ou petits cadeaux dans les ruelles marchandes autour de l’hôtel. On passe la majeure partie de la journée posé au Banais Café pour lire et écrire, et à arpenter les rues pour faire des achats. On a promis à Plak qu’on lui ramènerait un fœtus de lama… maintenant il faut que les douanes le laissent passer ! Alice tombe amoureuse d’une boutique de fringues tenue par un français (né à l’hôtel Dieu à Lyon !), « Gitano Urbano », qui fait des habits à la fois traditionnels et complètement dans l’air du temps, découpés classe. Il nous explique plein de trucs sur la laine d’alpaca. Alice repart avec un sac bien rempli ! Il nous conseille d’aller le déposer à l’hôtel sans trainer, un commerçant s’étant fait tuer par une barre en fer dans le cou la veille au soir, à l’angle de la rue ! Hum, ok.
On est actuellement au Banais Café ou Alice vient de finir « Des souris et des hommes » de Steinbeck, et d’où j’écris ces dernières lignes.
Notre avion décolle demain matin à 6h55 de l’aéroport « El Alto » de La Paz. Pour Lyon. Via Miami et Londres. Là, ça sent vraiment la fin.
Vendredi 28 août – La Paz / 20h02
Ca y est, ça sent la fin. Dernier soir à La Paz avant le grand retour. Les fins de voyage c’est toujours particulier, on se demande comment on va gérer le changement d’ambiance, la fin de la bulle. J’ai une grosse pensée pour le Woodstower, dont le 1er soir est déjà terminé… je croise les doigts. Les photos continuent à fleurir sur Facebook, ici et ici. Mais allez, avant de parler de retour, allons plutôt faire un tour du côté amazonien, suivre les quelques jours passés avec les animaux de la pampa…
Dimanche 23 août
Direction l’aéroport de la TAM (Transporte Aereo Militar, aéroport militaire), qui n’est pas le même que l’aéroport international, bien que les deux mutualisent leurs pistes. Un micro nous monte jusqu’à El Alto, l’autre nous dépose devant un petit portail gardé par un militaire. Un petit écriteau TAM nous prouve qu’on est au bon endroit. Le soldat nous ouvre la porte et nous dit d’aller tout droit. Il n’y a qu’un petit bâtiment un peu délabré au bout du petit chemin. Et personne ! Si, deux australiennes attendent dehors en lisant. Notre avion est sensé décollé dans 1h20. A l’intérieur du bâtiment, pas un chat. Pas de lumière. Le petit magasin est fermé, ainsi que le petit resto. Il y a juste une salle d’attente octogonale plongée dans l’obscurité, et puis des ouvertures vers la piste, sans aucun contrôle pour y accéder. Deux petits avions sont à l’arrêt. C’est un aéroport fantôme ! Flippant. L’heure qui suit amène son lot de passagers, une quinzaine, qui ne semble pas stressé. Une des australiennes trouve l’interrupteur pour allumer la lumière… les néons font tellement de bruit qu’on finit par les éteindre à nouveau. Une jeune fille se pointe vers la « zone d’embarquement » et pèse nos bagages avec une grosse balance à aiguille. On à l’impression que l’aéroport est tenu par une famille, un peu comme les auberges ! Les mochillas sont entassées dans un coin, on peut rejoindre la « salle d’embarquement », un petit SAS. Nos bagages à main ne sont pas fouillés, mais des panneaux nous informent quand même qu’il est interdit de transporter des flingues, des couteaux ou autres tronçonneuses. Ah bon, ok.
L’avion n’est pas si petit, il a une petite cinquantaine de sièges, du coup il fait bien vide. Un sandwich nous est distribué à l’entrée. Le vent souffle en fortes rafales sur l’altiplano, ça n’est pas rassurant. Mais on y est. Le décollage se passe… bien. Et puis le spectacle du paysage efface peu à peu le stress dû au non professionnalisme affiché de la compagnie. Les hauts plateaux secs laissent rapidement la place à de hauts sommets enneigés, qu’on a l’impression de toucher tant on vole prêt, l’avion gardant une altitude assez basse. Et puis les montagnes redescendent et une étendue verte sans fin prend le pas, sillonnée de larges cours d’eau saumâtres : la forêt amazonienne ! C’est incroyable comme tout a changé vite. Une petite barrière de montagnes, et l’univers s’est transformé. L’avion descend déjà. On aperçoit de mieux en mieux les grands arbres d’une densité impressionnante, et puis les nombreuses rivières. L’atterrissage se fait sur… de l’herbe !!! Une courte piste totalement recouverte de gazon. En sortant de l’habitacle, on se rend compte que les avions décollent et atterrissent sur une fine bande de terre centrale… et surtout qu’il fait chaud et humide ! On est en pantalon, polaire, pull, grosses chaussures, et on étouffe. On se change aussi vite que possible. L’aéroport est encore plus petit que celui de la TAM, plus proche d’une cabane qu’autre chose. On attend nos bagages dehors, à côté d’un petit portail donnant sur la piste d’herbe. Et puis une jeep nous transporte jusqu’au centre ville de Rurrenabbaque, plus communément appelée « Rurre ». La route est tantôt de terre, tantôt pavée de petit cailloux. On traverse un paysage peuplé de palmiers, arbres et plantes en tous genres. J’ai l’impression d’être de retour en Asie, dans les paysages de Birmanie ou du Laos. Plus du tout en Bolivie.
La ville a des allures de village amazonien tranquille, très verte, plutôt vivante, parcourue essentiellement de deux roues. On trouve une guest-house un peu à l’écart du centre, « El Curichal », tenue par un père et son fils, aux petits soins tous les deux. Les chambres donnent sur une petite cours intérieure dont tous les murs sont peints des couleurs de la jungle avec des animaux, et une dizaine de hamacs sont installé sous un manège de bois central. On est bien, on est ailleurs.
Il nous faut maintenant décider ce qu’on va faire de nos quelques jours ici, et rentrer dans la guerre des agences ! Il y a deux types de tours ici : dans la pampa, avec la certitude de rencontrer plein d’animaux sauvages, et dans la jungle, plus axée sur l’expérience de se promener, de dormir, de se familiariser à un environnement inconnu et fascinant. On hésite, on voudrait tout faire. On va voir plusieurs agences, les prix sont à peu près les mêmes, mais faire la pampa ET la jungle semble compliqué. Un couple d’anglais bien sympa rencontré à l’hôtel (Iain, originaire de Gibraltar, et Yohanna) part pour 3 jours de pampa avec « Dolphin Travel ». On décide de faire de même, on verra bien si on peut aller se balader dans la jungle le dernier jour. Nos sésames en main, on va manger des gros poissons frais du fleuve au piranha café (sauces roquefort et niçoise). Délicieux. Du coup on fait un peu pote avec le cuistot, un français pied-noir venu s’installer ici. Pendant notre retour à pied à l’hostal, un motard tente de me chopper ma sacoche à la volée, ou de me toucher le cul en me prenant pour une fille, on ne saura jamais. En tout cas il n’arrive à rien. Les chambres sont équipées d’un ventilateur, pour notre plus grand bien. On s’endort assez vite.
Lundi 24 août - Pampa / Dia 1
On prend le temps de se réveiller peinard, le départ n’est qu’à 9h. Il a plu toute la nuit, des grosses averses dont la violence nous a régulièrement réveillés. Il fait un peu plus frais du coup. On a tout ce qu’il faut avec nous : écran total et après soleil, anti-moustiques, sandales (achetées au marché la veille), maillot de bain (toujours pas Alice). On laisse les mochillas à l’hostal et on va petit déjeuner dans une échoppe de la « rue des agences » (elles sont toutes concentrées). On rencontre nos camarades de jeu de la pampa : Iain (30 ans, barbu cool) et Yohanna (24 ans, brune mimi), rencontrés à l’hôtel, Christina (dreadeuse blonde) et Diego (rasé et sec), un peu moins de 25 ans chacun, suisses allemands, et enfin les deux australiennes de l’avion, 22 et 27 ans, prénoms oubliés. On part en 4x4 pour un trajet de 3 bonnes heures sur une route pourrie (suffisamment pour devoir changer une roue à mi-parcours), jusqu’à Santa Rosa, porte d’entrée au parc protégé s’étendant de part et d’autre du fleuve Yacuma. Pendant le trajet, la pluie reprend, puis redouble d’intensité, et le terrain devient complètement boueux et difficile à pratiquer. Avec nous un chauffeur et Nico, le cuisinier fort sympathique qui nous suivra pendant trois jours. A notre arrivée à Santa Rosa, on nous donne à chacun un joli petit livret répertoriant tous les animaux susceptibles d’être croisés dans le coin avec photos, descriptifs et mode de vie (Alice porte un intérêt tout particulier au paresseux, dormant 22h sur 24h), et puis on se pose dans une sorte de cantoche en bois pour déjeuner un almuerzo local bien typique à base de soupe, de viande et de légumes.
On arrive au point de départ des embarcations (de longues barques en bois à moteur), sur les bords du rio Yacuma. Les groupes des différentes agences se préparent, entreposent leurs sacs et les containers de nourriture en queue de bateau, et partent le long du fleuve, les uns après les autres, à quelques minutes d’intervalle. C’est bientôt notre tour. Les australiennes ont rejoint une autre embarcation, on se retrouve à 6, ainsi que Nico le cuistot et Wilfredo le guide, qui nous a rejoint. Une bonne quarantaine d’années, l’air plutôt sympa au premier coup d’œil. La pluie a globalement cessé mais quelques gouttes tombent par ci par là, et le ciel est encore très couvert et venteux. Je n’avais pas prévu ça, et j’ai vite froid en t-shirt, short et sandale avec le courant d’air créé par la vitesse de la barque.
A part ça, les 3h de bateau amènent leur lot d’émerveillements. On commence par apercevoir de nombreux caïmans (tout noirs) et alligators (jaunes à bandes noires), posés comme des étrons sur la rive ou laissant leurs yeux dépasser de l’eau. Et puis des familles de capibaras (hidrochoerus hydrochaeris), mélanges informes entre sanglier (corps) et castors (tête). On s’arrête devant un arbre ou on entend des singes. Et soudain plein de petits singes genre ouistiti un peu jaunes et super mignons se pointent pour nous mater. L’un saute même dans la barque, la sillonne, monte sur les épaules de Diego et repart à la recherche de bouffe dans les sacs plastique. Un peu plus loin, un dauphin rose saute juste à côté du bateau. Des tas de dauphins de cette sorte vivent le long de ce cours d’eau. Les dauphins amazoniens ont été enfermés dans ces cours d’eau suite à des mouvements tectoniques, et ont subi des mutations génétiques pour pouvoir vivre dans ce nouvel environnement d’eau douce, loin de la mer. Leurs yeux sont devenus minuscules, adaptés à la vision en eau trouble, leur sonar s’est encore développé et leur aileron, très peu utilisé, s’est presque entièrement résorbé. On croise encore des grosses tortues d’eau posées sur des branches ou laissant dépasser leur tête de l’eau, et bien sûr une variété impressionnante d’oiseaux. Hérons, cigognes, différents rapaces qui s’envolent le long de l’eau à notre approche et rejoignent des branches d’arbres un peu plus en hauteur. Certains sont en train de pêcher dans l’eau. Et puis régulièrement, des poissons sautent à côté de nous. De part et d’autre du fleuve, des arbres touffus aux lianes tombant dans l’eau, d’autres dont il ne reste que les branches, avec parfois des gros nids autour des cimes, et puis quelques grosses fleurs, souvent roses, par ci par là.
On débarque vers 17h dans une « Ecolodge » toute en bois, construite sur pilotis, le long de la rive. On occupe une chambre à 8 lits, tous dotés de moustiquaires. D’autres groupes occupent d’autres chambres adjacentes. Des hamacs sont installés avec vue sur des arbres remplis de singes qui sautent de branche en branche. Un peu plus loin, en suivant un pont de bois, on arrive à un mirador ou tous les groupes viennent se poser pour admirer le coucher de soleil. On partage une bouteille de vin pour profiter du spectacle, le soleil de plus en plus rouge qui se laisse progressivement engloutir par la savane, au-delà du fleuve. En dessous, 4 ou 5 hommes jouent des tubes du folklore bolivien à l’aide de guitares, tambourins et flûtes, égayant une ambiance déjà bien chaleureuse. Le repas qui suit est un festin, Nico nous sert au moins 6 plats différents, salades diverses, petits légumes bien préparés, poulet en sauce et autres mets. On profite un peu du calme et des bruits des arbres et des animaux alentours avant d’aller se coucher. Dehors, les nuages se sont totalement dissipés et ont laissé la place à une pluie d’étoiles.
Mardi 25 août - Pampa / Dia 2
Le petit déjeuner commence à 7h. Différents beignets au fromage, pains, œufs au plat, crêpes… Nico s’este encore défoncé. Dehors le soleil a repris les rennes, mais des nuages continuent à voiler partiellement les cieux. L’ambiance est assez cordiale entre nous, mais ne vaut pas la virée du sud-ouest. Et le guide est plus distant qu’Edgar, ne mange pas avec nous, ne nous parle que pour nous détailler la suite des événements. On part à 8h pour la première activité de la journée : la recherche d’anacondas dans la savane !
L’embarcation ne nous sert qu’à traverser le cours d’eau, et on part à pied sur les terres de l’autre côté. Ca y est, on est vraiment dans la pampa. On traverse des terrains assez pauvres en végétations, des champs de fougères ne laissant dépasser que nos têtes, et puis des marécages encore gorgés de l’eau tombée la veille, plein de boue et de vase puante. Heureusement on s’est tous fait prêter des bottes. Ca ne nous empêche pas de nous enliser régulièrement et d’avoir du mal à lever une jambe engluée, surtout Alice qui a pris des bottes un peu trop grandes et qui manque à plusieurs reprises d’en laisser une dans la boue en laissant sortir son seul pied ! On se retrouve à côté d’un petit cours d’eau, et les recherches des gros serpents s’intensifient. Wilfredo se sert d’un bâton (au bout se séparant en deux, comme une langue de serpent) pour ratisser le fond de l’eau. On change d’endroit régulièrement, de cours d’eau en marécages herbeux, mais nos recherches restent vaines. Des nuages cachent le soleil. Wilfredo nous explique qu’il n’a pas plu les deux derniers mois, que le temps de la veille était absolument exceptionnel, et que les anacondas se cachent en l’absence de soleil. C’est con. On continue quand même à chercher. Iain est à deux doigts de tomber dans le marais, il se stabilise avec un bras qu’il plonge dans l’eau sans avoir à mouiller le reste. Yohanna, par contre, vacille complètement et tombe le cul dans l’eau boueuse. Ca c’est fait. Un peu plus loin, sur le chemin du retour, on aperçoit un autre groupe qui a lui trouvé un anaconda ! On le rejoint et on observe la bête. Environ 2m, pas le plus grand spécimen de son espèce (certains peuvent atteindre 9m !), mais quand même impressionnant. On le fait sortir de son talus, on le touche (tout doux), Diego le brandit en l’air.
Un peu plus loin, le terrain est presque dépourvu de végétation à part de l’herbe. Wilfredo nous explique que des vieux du coin brûlent régulièrement la pampa sur des lieues à la ronde pour que leurs troupeaux de vaches puisse brouter peinard. Ils sont maintenant interdits de le faire, mais ne comptent pas s’arrêter pour autant. Ils sont fous ces vieux de la pampa. Et effectivement, des vaches broutent au loin, côtoyées par quelques chevaux. Globalement Wilfredo parle beaucoup dans sa barbe, aux personnes les plus proches de lui, et n’a définitivement pas l’enthousiasme communicatif d’un Edgar. Mais il nous éclaire quand même sur certains trucs, c’est déjà ça. On rentre vers 11h30 au camp de base pour bouffer. Nico a encore pété les plombs en nombre de plats. La matinée a quand même été fatigante et on se jette dessus comme des affamés.
Après un petit repos à lire dans les hamacs et à jouer avec les singes, on repart en barque vers 14h. Objectif : aller nager avec les dauphins roses ! Wilfredo stoppe l’embarcation au milieu d’une sorte de cuvette élargissant le fleuve, où on a vu de nombreux dauphins la veille. On est d’abord trois à se baigner : Iain (prononcer « Yen »), Yohanna et moi-même, avant d’être rejoint plus tard par Christina et Diego. Il faut dire que se baigner dans des eaux totalement marron de boue et dans lesquels nagent piranhas et caïmans n’a rien de très excitant au premier abord !
Plusieurs reptiles nous regardent de la rive. A un endroit, mes pieds touchent quelque chose de visqueux et je hurle : c’est en fait seulement le fond, recouvert d’une couche gluante de dépôts divers. Et puis il y a les dauphins, qui apparaissent à intervalle varié, sautant et replongeant dans l’eau, pas très loin de nous. Il y en a beaucoup moins que la veille, mais il y en a. Wilfredo nous dit qu’aucun animal n’attaque les baigneurs tant qu’ils sont entourés de dauphins. Merci les gars.
Le soleil est maintenant seul dans un ciel totalement découvert, il fait chaud et on sèche rapidement. On revient un peu sur nos pas pour prendre un bras du fleuve et s’y arrêter. C’est l’heure de la pêche aux piranhas ! Wilfredo nous montre comment pêcher au fil, en accrochant des morceaux de viande crue au bout d’un hameçon et en tirant fort et au bon moment. Le truc est flippant : à peine les morceaux de viande immergés dans l’eau, ils se font immédiatement engloutir par ces poissons carnivores. Je repense au fait que j’étais moi aussi dans l’eau, à quelques dizaines de mètres de là. Gloups. Après un peu d’entraînement je m’avère être un pêcheur pas complètement naze. Mais je n’attrape presque que des petits piranhas, les jaunes. J’ai pitié, trop petits, je les rejette à l’eau. Je pêche plusieurs petites sardines aussi. Me semblant qu’elles n’ont pas encore embrassé leur destin, je leur rends aussi leur liberté. En fait je me sens incapable de tuer un poisson, c’est nul. Finalement je choppe un piranha jaune. Je prends mon courage à deux mains pour l’assommer contre le rebord du bateau. Il bouge encore. Je m’y reprends à dix fois, et j’ai toujours l’impression que le poisson est en vie. Je le tambourine encore plusieurs fois de toutes mes forces. Là je crois qu’il a son compte, mais je suis tremblant. Wilfredo me dit très justement : « si tu ne veux pas tuer les poissons, il ne faut pas pêcher ». Je m’en souviendrai. On a finalement 4 piranhas pour le dîner, un jaune (le mien) et trois rouges (pêchés par Wilfredo et Diego). Alice en a eu marre au bout de quelques minutes après avoir fait choux blanc, mais je lui soupçonne un peu moins de manières que moi si elle avait eu à tuer une de ces pauvres bestioles carnivores.
On est de retour vers 17h30. Encore un temps de repos. Les petits singes du coin sont maintenant nos potes. Alice veut absolument en ramener un, je prie pour qu’elle n’y arrive pas, tout en lui disant le contraire bien sûr. Le coucher de soleil est encore un grand moment. Les musiciens, couchés dans des hamacs, jouent et chantent une version espagnole d’ « Imagine » de John Lennon, alors qu’une bonne bière fraîche coule dans nos gosiers et que le soleil rouge embrase la Pampa.
Le dîner est exagéré, les plats sont innombrables et délicieux, pour tous les goûts. Les piranhas grillés arrivent en dernier, comme un trophée. Et puis Nico a fait un gâteau, c’est l’anniversaire de Taby, l’une des australiennes, qui a 27 ans aujourd’hui. Les gars de l’agence ont capté le truc sur la fiche d’inscription et lui ont préparé une surprise. Sympa. La discussion tourne voyage, itinéraires des uns et des autres, anecdotes loufoques et plus grandes incompréhensions sur la route.
Vers 20h, il fait nuit noire. Wilfredo nous propose de faire un dernier tour sur le fleuve pour observer la luminosité des yeux de caïmans dans la nuit. Ok ! On n’allume pas le moteur, on se laisse glisser par le courant en écoutant les bruits de la pampa et en éclairant les rebords à l’aide de nos lampes de poche. Les yeux des caïmans et des alligators réfléchissent la lumière de nos torches en de petits scintillements rouges. On en dénombre une centaine, qui se reflètent parfois eux même dans l’eau. La balade est vraiment reposante, et on a l’impression de découvrir une autre facette du fleuve. Le retour, contre courant, se fait avec le moteur, et on revoit tous les yeux rouges filer à toute allure à droite comme à gauche. De retour, on ne fait pas long feu avant de s’éteindre.
Mercredi 26 août - Pampa / Dia 3
J’ai très mal dormi, fais d’affreux cauchemars. Mes enfants (?) étaient devenus méconnaissables, avaient vendu leur âme au diable ou quelque chose comme ça. Je les regardais dans les yeux sans les reconnaitre, et ça m’emplissais d’une peur infinie. Réveillé en pleine nuit, remplie de tous les bruits étranges de la nuit, je n’ai même pas eu le courage d’aller aux toilettes. Le réveil à 7h m’apparait presque comme une délivrance.
Après un dernier petit déjeuner ultra copieux, on embarque une fois encore sur le fleuve. Cette fois, on va plus loin qu’on n’est jamais allé, à une allure pourtant très cool, et on prend le temps d’admirer le paysage et la faune, en perpétuelle évolution. On retrouve un tas d’animaux déjà aperçus, mais d’autres encore. En regardant bien dans les arbres, on aperçoit des perroquets aux couleurs rouges vives, qui nous racontent on ne sait quoi (surement des conneries), et puis des petits colibris (enfin on croit). Le soleil est au rendez-vous aujourd’hui, et les tortues sont toutes de sortie, les unes sur les autres (dans des positions très moyennement catholiques), par dizaines à chaque fois. Certaines d’entre elles plongent dans l’eau en nous voyant arriver, alors que les autres nous lancent des regards d’un vide absolu. Des aigles tournoient au dessus de nous, se posant parfois dans les branches d’un arbre. A un endroit du fleuve, sans doute plus profond, on se retrouve littéralement entouré de dauphins roses, qui ne cessent de sauter autour du bateau. On a vraiment l’impression d’être dans un autre pays avec Alice, dans un autre voyage. Il y a quelques jours à peine on se caillait sur des volcans à 5000m d’altitude, et là on est dans la jungle amazonienne avec des dauphins et on crève de chaud. Hallucinant. On a du mal a se dire que le voyage touche à sa fin aussi, et on profite de tous ces instants au maximum, conscients qu’ils sont précieux et qu’ils resteront.
De retour à 10h30 au camp de base, on fait nos sacs pour le départ et… on mange à 10h45 ! C’est de la folie, je n’ai jamais mangé autant. Je crois que pour la première fois en voyage je risque de rentrer avec quelques kilos en plus ! C’était pas vraiment le but, mais la nourriture est tellement bonne ici qu’il est difficile de dire non. Wilfredo est de plus en plus antipathique avec le temps, se fout un peu de notre gueule ouvertement, nous engueule si quelqu’un n’a pas entendu une consigne qu’il a dit en murmurant avec le moteur allumé… personne dans le groupe n’est très fan. Nico par contre (le cuistot) a bien mérité un pourboire !
A midi, on est sur le bateau pour le chemin retour jusqu’à Santa Rosa. Dans le sens du courant, on ne met qu’une heure et quart pour faire le trajet, en plein cagnard. Moi, comme un con, j’ai fait péter le t-shirt et n’ai pas jugé opportun de m’enduire de crème… je m’en mordrai les doigts le soir même. On repart en jeep vers 14h, pour 3 bonnes heures de route de Santa Rosa à Rurre. Toujours aussi pourrie, la route a toutefois séchée. Ca ne nous empêche pas de crever une fois de plus. La routine quoi. A 30 minutes de l’arrivée, Christina se rend soudain compte qu’elle a oublié sa sacoche avec tous ses papiers et son pognon lors de la pause précédente, à 30 minutes de route également. On insiste tous pour y retourner, mais Wilfredo et le chauffeur nous font comprendre qu’ils n’ont pas que ça à faire, qu’il faut faire attention à ses affaires. Pas cool. Du coup je prête 300 Bs à Diego, qui parvient à stopper un motard acceptant de faire l’aller-retour avec lui. J’ai l’impression d’avoir eu tellement de galères de ce genre dans ma vie que la vivre comme simple observateur me semble presque irréel. Si je pousse un peu, avec le recul de ce jour où j’écris ces lignes, j’ai presque un début de pointe de jalousie ! Mais mieux vaut ne pas pousser ;-)
Retour à Rurre. La meuf présente dans le bureau de l’agence n’a pas la clé permettant d’ouvrir le tiroir dans lequel on a laissé nos passeports, on devra repasser. Retour au Curichal, le vieux est définitivement cool. Bonne douche et repos. On voit un papillon géant. Christina me rend l’argent prêté, tout roule. On retourne à « Dolphin Travel » vers 19h, nos passeports nous sont rendus. On voit avec elle s’il est possible d’aller faire un tour dans la jungle le lendemain matin, histoire de profiter jusqu’au bout, et vu que notre vol est à 16h20. Elle nous dit que oui, on organise tout, et puis soudain elle se rappelle qu’elle a entendu que le vol de la TAM serait annulé le lendemain. Elle passe un coup de fil et confirme : on ne pourra rentrer par ce vol. On avait prévu une légère marge pour être sûr d’être à La Paz à temps et pour y faire des emplettes, mais c’est quand même préoccupant. Elle nous dit qu’on peut se faire rembourser en cas d’annulation, et qu’on peut prendre un vol d’une autre compagnie, AmasZonas. Elle passe encore des coups de fil, il reste bien de la place pour le lendemain, à 13h. On annule la jungle, ça va faire short. Elle nous dit de revenir la voir vers 8h, à l’heure d’ouverture des agences, pour nous aider à gérer tout ça. Super gentille la madame. Pas comme la majorité des habitants de la ville, qui répondent à peine à nos questions et qu’on a l’impression d’emmerder au plus haut point, beaucoup moins tranquilles que dans les hauteurs de l’altiplano.
Remis de ces changements de dernière minute, on va manger une bonne pizza (de la bouffe de gringo) au « Monkey bar ». Ambiance feutrée, bougies et Smashing Pumpkins (décidément). L’appel du lit prend le pas sur les autres options qui s’offrent à nous. J’ai des coups de soleil partout, ça brûle.
Jeudi 27 août
On se lève pour filer à « Dolphins Travel » et régler définitivement nos histoires de vols. La madame nous accompagne au bureau de la TAM. Ca ouvre juste, personne n’est compétent, le gars regarde nos billets et nous dit d’aller au bureau central de La Paz pour procéder au remboursement. Bon. Le bureau d’AmasZonas est plus spacieux, plus pro, presque tout le monde passe par cette compagnie. La meuf nous dit qu’il n’y a plus de place pour 13h, mais qu’il y en a pour… 9h30, décollage dans 1h20 ! On commence par dire ok, avant de se rappeler qu’on a du linge à la laverie, qui ne sera prêt qu’à 11h ! On hésite à prendre un vol le lendemain matin, et puis finalement il reste 2 places dans celui de 11h30, ça nous laisse plus de temps, on accepte de suite. Les billets en poche, on court à la laverie en demandant s’ils peuvent se dépêcher, ils nous répondent que tout sera prêt pour 9h30. Parfait. Pffff, que de rebondissements, on a bien mérité un bon petit déj dans un établissement à la cool.
On rentre à l’hôtel chercher nos affaires, dire au revoir à la petite famille, on va chercher notre linge tout propre, et nous voilà à l’heure pour prendre le bus en direction de l’aéroport. Le vol n’est pas à l’heure, lui, et on attend un bon moment que l’avion atterrisse et que les voyageurs sortent pour pouvoir y rentrer à notre tour. Il n’y a qu’un avion qui fait 5 allers-retours par jour entre Rurre et La Paz ! La gestion à l’aéroport est au moins aussi roots qu’à La Paz, pesée à un endroit, retrait des cartes d’embarquement ailleurs, règlement d’une taxe d’aéroports « spécial touristes » à un troisième guichet. On nous appelle dehors pour rejoindre l’avion sans passer par la porte d’embarquement (ils doivent avoir perdu la clé du cadenas).
L’avion est minuscule, beaucoup plus petit que celui de la TAM. 19 places passagers seulement ! Je n’ai jamais pris un avion « de ligne » aussi rikiki. La porte menant au cockpit n’est pas fermée. L’avion décolle après une accélération très rapide sur la courte piste herbeuse. Ca fait quand même peur. D’en haut le spectacle du paysage est toujours aussi beau, mais les secousses se font beaucoup plus sentir, surtout arrivé en fin de parcours, l’avion étant en proie aux bourrasques de l’altiplano. L’arrivée est assez remuante, ça secoue dans tous les sens, on est content d’avoir atterri. A côté de nous, un gars est totalement en nage, dégouline de ce qu’on pense avoir été une grosse frayeur. On récupère nos affaires et on fonce dans un micro à destination du centre ville.
Juste avant d’arriver place San Fransisco, Alice aperçoit Marc sur le trottoir, notre pote montagnard du sud-ouest qu’on avait laissé prêt de la frontière chilienne ! On sort du véhicule et on court dans sa direction, mais en vain, il a déjà été absorbé par la foule se pressant dans les rues aux allures de marché. On retourne donc à notre QG de La Paz, l’hostal Sagarnaga. Les gars nous reconnaissent et nous parlent en français. On se sent un peu chez nous ici. On va se manger un petit en-cas et d’obligatoires « platano con leche » au Pepe’s bar. De retour à l’hôtel, Alice sombre dans une bonne sieste pendant que je profite du Wi-Fi dans la chambre (yeah !) pour regarder mes mails en retard, y répondre, me rencarder sur les actualités françaises, internationales et musicales, uploader de nouvelles photos sur Facebook… glander sur la toile, comme ça ne m’ai pas arrivé depuis longtemps.
Je finis par aller au bureau de la TAM pour le remboursement des billets. Je poireaute super longtemps avant qu’un gars s’occupe de moi et me dise qu’il ne peut rien faire sans Alice, on doit être tous les deux présents. Ok, on verra ça demain. Au réveil d’Alice, on va dîner dans notre resto préféré « The Colonial Pot », on a nos petites habitudes ici. Elle commande un hachis Parmentier pendant que je me régale d’un filet de lama, rosé, absolument délicieux, accompagné d’une sauce aux champignons, d’une bonne purée maison et d’un peu de riz. Le riz, c’est parce que mes intestins ont fini par succomber (au moins en partie) à la bouffe locale. Et Alice n’est pas au top non plu. Mais bon, on a quand même bien tenu, hein. On va se coucher totalement repus.
Vendredi 28 août
On se lève vers 8h après une bonne nuit de sommeil. Après un bon petit déj au Pepe’s bar, direction le bureau de la TAM (on va y arriver). Le gars de la veille nous fait encore patienter devant une télé qui diffuse des clips géniaux. On voit enfin le clip du tube de l’été d’Amérique du Sud, qu’on a entendu partout, aussi bien au Pérou qu’en Bolivie, et qui fait un truc comme « One, two, three, four, un, dos, tres, quatro, RUMBA ». Une tuerie qui laisse des traces dans la tête. Le clip montre plein de meufs à moitié nues remuant leur cul, évidement. On apprend que le chanteur s’appelle « Pitbull ». Classe. Dans un autre style, « Fey », mélange de Lorie et de Kylie Minogue, elle est aussi tout à fait recommandable. Quand il a finit de remplir des tas de paperasses, le type nous en fait signer plein aussi, et nous assure que l’argent sera directement reversé sur le compte d’Alice. Ca, c’est fait.
On retourne faire un tour en ville, bien décidés à acheter quelques souvenirs ou petits cadeaux dans les ruelles marchandes autour de l’hôtel. On passe la majeure partie de la journée posé au Banais Café pour lire et écrire, et à arpenter les rues pour faire des achats. On a promis à Plak qu’on lui ramènerait un fœtus de lama… maintenant il faut que les douanes le laissent passer ! Alice tombe amoureuse d’une boutique de fringues tenue par un français (né à l’hôtel Dieu à Lyon !), « Gitano Urbano », qui fait des habits à la fois traditionnels et complètement dans l’air du temps, découpés classe. Il nous explique plein de trucs sur la laine d’alpaca. Alice repart avec un sac bien rempli ! Il nous conseille d’aller le déposer à l’hôtel sans trainer, un commerçant s’étant fait tuer par une barre en fer dans le cou la veille au soir, à l’angle de la rue ! Hum, ok.
On est actuellement au Banais Café ou Alice vient de finir « Des souris et des hommes » de Steinbeck, et d’où j’écris ces dernières lignes.
Notre avion décolle demain matin à 6h55 de l’aéroport « El Alto » de La Paz. Pour Lyon. Via Miami et Londres. Là, ça sent vraiment la fin.
Vendredi 28 août – La Paz / 20h02
1 commentaire:
Un rapide coucou, en plein transit a Bogota ! Viva Columbia,
Leo
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